Le Miroir des âmes by Nicolas Feuz

Auteur:Nicolas Feuz
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782889441013
Éditeur: Slatkine & Cie
Publié: 2018-08-24T00:00:00+00:00

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Berd l’avait avertie que sa punition n’était pas terminée. Alba l’avait cru. Il lui avait dit qu’elle devait remplacer Aureola auprès d’un client exigeant. Elle avait acquiescé. Il avait précisé qu’elle ne serait pas payée pour cette prestation. Elle s’en fichait, trop heureuse d’être encore en vie. Il lui avait ordonné de s’allonger nue sur le lit, sur le ventre. Elle avait obéi et avait écarté ses membres en croix. Avec des menottes, Berti avait attaché ses poignets et ses chevilles aux quatre coins du lit. Elle n’avait pas bronché. Pas même quand il lui avait mis un bandeau en cuir sur les yeux. Le client voulait rester anonyme.

Elle avait attendu une éternité, seule dans les ténèbres. Le froid et la peur l’avaient envahie et lui avaient donné la chair de poule. Elle frissonnait à l’idée de ce que cet inconnu pourrait lui faire.

Il y avait eu le bruit d’une porte, des pas sur le plancher, le froissement de vêtements qu’on ôte et qu’on pose sur une chaise, la respiration de la bête qui s’excite à la vue de ce corps nu.

L’animal n’avait pas parlé, ne l’avait même pas caressée. Il s’était assis sur elle, lui avait écarté les fesses et l’avait sodomisée sans préliminaire. Elle avait crié, mais il l’avait aussitôt bâillonnée avec un bout de tissu qu’il lui avait enfoncé de force dans la gorge.

L’acte avait duré tant et plus. Probablement de longues minutes dans la réalité. Des heures dans l’esprit d’Alba.

Au fil du temps, l’esprit de la prostituée s’était éloigné de son corps, qui n’était devenu qu’une simple enveloppe charnelle. L’exutoire du désir putride d’un gros porc, dont elle ne sentait que l’embonpoint s’écraser dans le creux de ses reins au rythme du va-et-vient.

Flottant au-dessus de la scène de viol, elle se demanda à combien de reprises Aureola avait dû subir les assauts de la bête. Probablement de nombreuses fois. Elle comprit d’autant mieux le besoin chronique qu’avait Aureola de noyer son cerveau dans l’alcool et la cocaïne.

Les paradis artificiels n’étaient pas le refuge d’Alba Dervishaj. Elle devait trouver un autre moyen de s’évader. Par la pensée.

Son esprit se mit à voyager. Il abandonna la pièce lugubre, sortit à la lumière du jour, quitta la ville de Neuchâtel et plana au-dessus des eaux du lac. Il ne prit pas la direction du Kosovo, mais celle de Lausanne. De la place de la Riponne. De l’appartement de la rue Neuve. Des deux seules personnes dont Berti Balla devait à tout prix ignorer l’existence.

Sa mère et son fils.

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