Le Dernier Lit by Alain Beaulieu

Le Dernier Lit by Alain Beaulieu

Auteur:Alain Beaulieu
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782764417232
Éditeur: Québec Amérique
Publié: 2012-12-12T00:00:00+00:00


Je me garai devant la réception du Motel Galaxie, un établissement à première vue bien tenu. J’invitai Solange à m’accompagner; elle déclina l’offre, dit préférer m’attendre dans la voiture.

J’entrai, m’appuyai au comptoir et fit retentir la clochette de service. Un homme dans la quarantaine, frêle et petit, sortit d’une arrière-salle. Les cheveux courts gommés sur le côté, la moustache raide aux pointes légèrement retroussées, il s’approcha et ouvrit son registre.

— Monsieur? dit-il en guise de salutations. C’est pour une sieste ou pour la nuit ?

— C’est pour un renseignement. Je cherche un ami qui est passé par ici la semaine dernière.

Il leva sur moi des yeux menaçants.

— Qu’est-ce que c’est, cette fois-ci ? Vous êtes détective privé, c’est ça ?

— Non, pas du tout.

— Il en vient un nouveau chaque semaine, vous savez. Quand la petite dame est tannée de passer pour une idiote, elle fait suivre son mari, le prend en flagrant délit et part avec le magot. Vous me direz que c’est une juste vengeance et peut-être avez-vous raison. Sauf que moi, monsieur, je ne joue pas à ce jeu-là. Ma clientèle peut compter sur ma discrétion. C’est une garantie de la maison. Vous auriez beau étendre sur mon comptoir une pleine rangée de billets verts, vous n’auriez rien de moi. Une tombe !

— Je viens de vous dire que je ne suis pas détective privé.

— Croyez-vous que je m’attendais à vous voir l’avouer ? Y a pas un privé qui s’annonce comme tel. Parfois, ils se font passer pour la police. Mais je sais distinguer le vrai du faux puisque le vrai, le sergent chargé des enquêtes dans ce secteur-ci, est un client de la maison. Alors, qu’est-ce que vous dites de ça, hein ?

— Écoutez, tout ce que je veux savoir...

— Vous êtes de la police ?

— Non.

— Alors?

— Alors quoi ? dis-je, impatient.

— Qu’est-ce que vous voulez ?

— Je vous l’ai dit : je cherche un...

— Confidentiel!

— Mais laissez-moi parler ! m’emportai-je. Il soupira, croisa les bras et se buta.

— Un de mes amis est venu ici la semaine dernière...

— Vous vous répétez.

— Il s’appelle Victor Poulignac.

— Parce que vous croyez que les gens qui signent mon registre s’y inscrivent sous leur véritable identité. Vous êtes bien naïf, monsieur. Si vous saviez le nombre de Jacques Villeneuve et de René Lévesque qui sont passés par ici... Cette semaine seulement, j’ai eu trois Dan Bigras, deux Lucien Bouchard, un Charlie Chaplin et un Gérard Depardieu !

— Et on peut le voir, votre registre ?

— Comment vous appelez-vous ?

— Jean-Pierre Ferland, blaguai-je.

— J’ouvre mon registre qu’à ceux qui s’identifient formellement, avec carte authentifiée s’il vous plaît, celle de l’assurance-maladie de préférence.

— À cause de la photo.

— Oui, monsieur, à cause de la photo. Une photo vaut mille mots. Tout est dans l’œil, et dans le pif aussi. Moi, j’ai du flair. Vous me dites que vous n’êtes pas de la police et je vous crois. Vous me dites que vous n’êtes pas détective privé et je vous crois.



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