Le Crime du Palace by Florence Tamagne

Le Crime du Palace by Florence Tamagne

Auteur:Florence Tamagne
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Éditions Payot
Publié: 2017-02-14T16:00:00+00:00


Toulon, port de la drague

Dès réception du télégramme, émanant de l’état-major général, signalant que le meurtre d’Oscar Dufrenne pouvait être le fait d’un marin permissionnaire, les services de la préfecture maritime avaient alerté tous les commandants des formations placées sous son autorité.

Des vérifications furent faites dans toute une série de formations, dont certaines jugées particulièrement suspectes, comme la caserne de Brégaillon, située dans les faubourgs de Toulon, « composée en majeure partie de marins algériens, réputés pour être des pédérastes actifs », ainsi que sur les bâtiments placés sous les ordres de l’amiral commandant la 1re escadre en rade de Toulon. Les préjugés sexuels et raciaux apparaissaient ici étroitement liés.

La police se rendit également à bord du cuirassé Lorraine, battant pavillon de l’amiral commandant de l’escadre. Le chef d’état-major leur confirma que, dès la réception du télégramme sur les marins permissionnaires, tous les commandants de bord avaient été convoqués sur le vaisseau amiral : « Au cours de cette conférence, chacun des commandants avait été invité à transmettre à l’état-major général, toutes les fiches “vertes” concernant les marins plus spécialement connus comme pratiquant l’homosexualité32. »

C’est que, dans l’entre-deux-guerres, la réputation de Toulon n’était plus à faire. La visibilité de la prostitution maritime amateur y était telle qu’elle inquiétait les autorités militaires et portuaires, qui avaient organisé la surveillance des lieux de drague. Des dossiers mensuels de surveillance, listant personnalités civiles et militaires signalées comme homosexuels, ainsi que les établissements qui les accueillaient, y furent tenus à partir de janvier 1925, lorsqu’une série de scandales impliquant des matelots fut mise au jour, et ce jusqu’en octobre 1942. Une attention particulière était portée aux dossiers mettant en cause des marins « homosexuels et communistes », signe de l’inquiétude relative aux possibilités de trahison liées aux relations entre hommes.

Les civils répertoriés par la police ne formaient cependant pas un groupe homogène : tous les âges étaient représentés, entre dix-sept et soixante ans environ ; les professions des suspects étaient également variées, mais témoignaient d’une prépondérance de la classe ouvrière et de la petite classe moyenne. De fait, les ouvriers fréquentaient les mêmes établissements que les marins et travaillaient sur le port, ce qui facilitait les contacts. Certains individus étaient fichés comme des « invertis notoires », et parfois affublés de surnoms. Un arsenal de données « psychologiques » était invoqué de manière à permettre l’identification facile d’un inverti. La police prenait soin de noter les signes de reconnaissance employés, les méthodes de drague, les préférences sexuelles, et, bien sûr, les lieux de rencontre33.

Pour Le Mutilé de l’Algérie, Dufrenne « était connu jusqu’à Toulon où sévit avec intensité l’homosexualité ». Un garçon de café, interrogé par le journal, affirma que Dufrenne, par ailleurs « un homme très bon, qui ne savait rien se refuser », venait régulièrement déjeuner à Toulon en compagnie d’amis, tous de sexe masculin, et notamment de faux marins34.

Suite au meurtre de Dufrenne, des surveillances furent exercées près des établissements connus pour recevoir de façon habituelle ce genre de clientèle. Furent



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