Le chevalier sans nom by Montella Christian de

Le chevalier sans nom by Montella Christian de

Auteur:Montella, Christian de [Montella, Christian de]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy, Jeunesse
Éditeur: flammarion
Publié: 2003-03-15T23:00:00+00:00


5

Le roi infirme

Ils quittèrent l’enceinte du village par la grand-porte désormais ouverte et suivirent quelque temps le cours de la rivière dont l’eau maléfique avait failli geler le cœur du chevalier. Elle courait, vive et transparente, délivrée des enchantements. Sous prétexte d’ouvrir la route et de parer à tout danger, Lancelot chevauchait en avant. Il s’épargnait ainsi la compagnie d’Ellan. Il ne voulait plus l’entendre parler de son amour pour lui. Il ne voulait plus soutenir son regard de reproche.

Ils entrèrent dans un bois dont les arbres, bientôt, se clairsemèrent. Certains, de plus en plus nombreux à mesure que les trois cavaliers avançaient, étaient noirs, défeuillés, morts. Le chant des oiseaux s’était tu. La terre elle-même ne portait plus d’herbe, de fleurs, de plantes. Couleur de cendre, elle volait en une fine poussière sous les sabots des chevaux.

Il sembla à Lancelot que la nuit tombait plus vite qu’elle n’aurait dû en cette saison. Ou, plus justement, qu’elle les attendait quelque part, après cette forêt morte, au bout du fil ondoyant du chemin, et qu’ils allaient à sa rencontre – une nuit perpétuelle, non pas noire mais gris cendre comme le sol, installée à tout jamais sur cette terre désolée.

Quand ils eurent dépassé les derniers arbres noirs aux branches nues, ils trouvèrent une fontaine. Les ultimes lueurs du soleil s’évanouirent dans la pénombre étale qui couvrait toutes choses. L’eau de la fontaine semblait seule vivante aux alentours. Coulant dans une vasque en demi-lune, elle s’en déversait par un bec et formait un ruisseau descendant au creux du vallon. Pourtant, pas un brin d’herbe ne poussait sur ses bords caillouteux de basalte et d’obsidienne.

— Nous allons dormir ici en attendant le jour, dit Lancelot en sautant à bas de son roncin. À moins que l’aube ne se lève pas sur cette terre ?

— Il y aura une aube, Monsieur, dit Galehot. Grise comme la nuit – d’un gris plus clair. Nous sommes entrés sur la Terre Gaste, le royaume du père d’Ellan, le roi Pellès.

— Qu’a donc fait votre père, demoiselle, pour subir cette malédiction ?

— Posez-lui la question, Lancelot, et il vous répondra lui-même.

C’était dit sur un ton sans réplique. Lancelot n’insista pas. Prenant son cheval par la bride, il le conduisit à la fontaine. Il lui tapotait machinalement l’encolure tout en le regardant boire, quand il crut distinguer un reflet jaune de l’autre côté de la margelle. Contournant le roncin, il s’en approcha.

C’était un petit peigne d’or. Il le reconnut aussitôt : il ornait la chevelure de la reine Guenièvre lorsqu’elle lui avait donné l’épée. Quelques cheveux, comme d’un or plus fin, plus précieux et plus rare, y étaient accrochés. Il les caressa délicatement entre le pouce et l’index. Il s’apprêtait à les porter à ses lèvres quand il entendit un léger bruit de pas derrière son dos. Il referma vivement le poing sur les cheveux et le peigne d’or.

— Avez-vous réfléchi, chevalier ?

Ellan se tenait devant lui et, malgré l’étrange ombre du soir, ses yeux brillaient d’une flamme bleue.

— Réfléchi à quoi ?

— Au destin qui nous a fait nous rencontrer.



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