le capitaine coeur-en-berne by omer Refreger

le capitaine coeur-en-berne by omer Refreger

Auteur:omer Refreger
La langue: eng
Format: mobi
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


V - Le prisonnier de Barbe-noire

Barbe-noire que je n’avais jamais vu, était d’un aspect terrible, bien tel que la légende le représentait.

C'était un homme puissant, bâti en hercule, dont la taille, si elle n’excédait pas deux mètres, n’était guère en dessous.

Une chevelure en broussaille, jamais peignée, lui retombait sur les épaules. La fameuse barbe noire, qui lui avait donné son nom de guerre, lui descendait jusqu’à la ceinture. Les parties du visage, qui n’étaient pas envahies par ce système pileux, laissaient apparaître une grande bouche aux lèvres minces et à la denture incomplète, un nez énorme, enluminé par l’alcool, des yeux vifs comme l’acier, à l’éclat méchant insoutenable.

Non, vraiment, Barbe-noire ne faisait pas mentir sa légende. Il n’avait pas l’air commode et rien d’un Apollon.

Il portait en bandoulière une écharpe de cuir garnie de trois paires de pistolets pendant dans leurs fontes. Des mèches pour mettre le feu aux poudres s’enroulaient autour de son poignet, comme de venimeux serpents bruns. À sa ceinture, une épée démesurée, sans fourreau, passée telle quelle entre deux tours de l’étoffe, battait sa botte quand il marchait.

Il courait, sur le compte de cet impressionnant personnage, des histoires édifiantes, bien connues de tous les habitués des repaires flibustiers.

C'était d’abord l’histoire des barils de soufre et de poix.

Un jour, en mer, excité par la boisson, il avait dit : « Allons, faisons-nous notre propre enfer et voyons combien de temps nous pourrons y rester. » Sur quoi, aidé de ses officiers, il s’était enfermé dans la cale et avait embrasé des pots de poix, de soufre et autres matières combustibles. Les officiers criaient pour avoir de l’air quand il se décida à ouvrir les écoutilles, satisfait d’avoir tenu plus longtemps que les autres.

Barbe-noire se prétendait un démon incarné, plus ou moins cousin du diable. A un homme qui, la veille d’un engagement lui demandait si, pour le cas où il lui arriverait malheur, sa femme ne devait pas savoir où il cachait son trésor, il avait répondu que « personne en dehors de lui et du diable ne savait où il était et que celui des deux qui vivrait le plus longtemps pourrait garder le tout ».

On racontait encore qu’au moment des combats, il avait auprès de lui un officier inconnu de l’équipage et qui pouvait fort bien être un suppôt de l’enfer.

Tel était le légendaire forban qui nous reçut sur le pont du Point-Cardinal.

— Salut à vous, capitaine Barbe-noire, débuta Cœur-en-berne. Je n’avais jamais eu l’occasion de vous rencontrer, encore que vous ne me soyez pas inconnu. Le récit de vos prouesses court sur tout l'Océan. Je remercie les circonstances de me mettre en votre présence.

Le ton était poli, mais dépourvu de chaleur.

Sans être grand clerc, il était facile de comprendre que le noble, fier et hardi capitaine du Belle-Régine n’aimait pas Barbe-noire. Ils étaient trop différents, aussi bien physiquement que moralement.

De mon côté, sans avoir jamais eu commerce avec l’homme, sa soi-disant parenté avec le diable et sa conduite pour le moins extravagante n’avaient pas



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