L'Œcumène d'or by John C. Wright

Auteur:John C. Wright [Wright, John C.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: SF
Éditeur: Le Livre de Poche
Publié: 2007-10-31T16:00:00+00:00

2

(L’espace d’un instant de confusion, elle regarda sans comprendre les grandes mains musclées qui tenaient son journal couleur pastel. Ses mains… ? Non, les mains de Phaéton.)

Les souvenirs de Daphné s’estompèrent. Phaéton se réveilla. Il lui fallut quelques instants pour se rappeler où il était : dans une cabine privée, un cercueil mental, dans un hospice élémosinaire situé dans un segment de la cité-ceinture en orbite équatoriale, au sein du rêve profond, de l’espace mental semi-public.

Il écarta les doigts pour signaler une demande d’ouverture ; les panneaux entourant son balcon s’évanouirent. Autour de lui, étagées vers le haut comme dans un cañon, s’empilaient des images et des fenêtres ouvertes décrivant la Mentalité locale.

En contrebas, on trouvait des lumières mouvantes indiquant la circulation, une géométrie de portes s’ouvrant et se refermant à mesure qu’apparaissaient et disparaissaient scènes temporaires, drames téléphoniques et salles de téléconférence. Plus haut, de grandes fenêtres affichant des scènes extraites d’oniropaysages permanents ; encore plus haut, l’éclat froid et frémissant des synoétiques ; et, tout à fait au sommet, en étages innombrables, les sophotechs les plus élevés, l’Ennéade et la Terresprit. Les canaux de cette dernière étaient saturés (ils étaient toujours saturés – tout le monde souhaitait lui parler), et cette situation était visualisée sous la forme d’un essaim d’arcs-en-ciel dissimulant la cime de l’édifice mental à la façon d’un nuage radieux.

Comme Phaéton n’était pas connecté à Rhadamanthe, l’unité locale ignorait qu’il appartenait à Gris-Argent, si bien que la scène qui l’entourait n’était pas conforme au protocole de cette maison. Plutôt qu’une table pourvue de pieds, par exemple, il avait à sa disposition une simple surface plane en lévitation. Il pouvait se mettre en position « assise », mais, si cela libérait ses pieds de toute sensation de poids, cela faisait aussi disparaître la moitié inférieure de son ego-image.

Sur la surface plane flottaient des icônes provenant du rêve médian, de sorte qu’il put recenser en un coup d’œil la totalité des services à sa portée. Un menu affichait les mets et les boissons illusoires que pouvait lui procurer la table. Comme il ne se trouvait pas en territoire gris-argent, il pouvait « manger » tout son soûl sans que son image enfle jusqu’à l’obésité.

D’autres menus proposaient des services différents. Des icônes livresques pouvaient insérer des fichiers entiers dans son esprit, soit directement, soit en mode linéaire. On lui proposait aussi des hallucinations pornographiques ; toute une bibliothèque de simulations intégrales, y compris des drames en pseudomnésie impossibles à distinguer d’une expérience authentique. Des synoétismes et des interfaces conçus pour booster son esprit et sa mémoire, pour lier ses pensées à celles de lointains sophotechs. Des canaux destinés à apaiser la douleur de l’individu, qui l’invitaient à se fondre avec d’autres esprits, au sein d’une configuration hiérarchisée ou radiale, à moins qu’il ne préfère se perdre dans l’esprit de masse d’une composition, ce qui abolirait son statut d’individu à part entière.

Les icônes des compositions lui paraissaient fort séduisantes. Il y avait la composition Porphyrogène, un nom des plus respectables,

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