La vieille fille blanche by Nathaniel Hawthorne

La vieille fille blanche by Nathaniel Hawthorne

Auteur:Nathaniel Hawthorne
La langue: fra
Format: epub
Tags: Bibliothèque Marabout - Fantastique n° 454
Éditeur: MARABOUT
Publié: 1973-04-15T00:00:00+00:00


Le voile noir du pasteur

Parabole

Le sacristain se tenait sous le porche de l’église de Milford, tirant vigoureusement sur la corde de la cloche. Les vieilles gens du village venaient, tout voûtés, le long de la rue. Des enfants aux visages clairs sautillaient gaiement aux côtés de leurs parents, ou bien singeaient une démarche plus sérieuse, conscients de la dignité de leurs vêtements du dimanche. De jeunes et pimpants célibataires dévisageaient à la dérobée les jolies filles et s’imaginaient que le soleil dominical les rendait encore plus jolies que les jours de la semaine. Lorsque la foule se fut en grande partie engouffrée sous le porche, le sacristain se mit à sonner la cloche, l’œil fixé sur la porte du Révérend Hooper. Car dès qu’apparaissait la silhouette du pasteur la cloche devait cesser son appel.

— Mais qu’est-ce que le bon pasteur Hooper a donc sur le visage ? s’écria tout à coup le sacristain, stupéfait.

Tous ceux qui entendirent ces mots se retournèrent immédiatement et ils aperçurent M. Hooper qui s’avançait de son allure méditative vers l’église. Alors ils tressaillirent tout d’un commun accord, exprimant plus d’étonnement que si quelque pasteur inconnu fût venu pour essuyer les coussins de la chaise de M. Hooper.

— Êtes-vous sûr que c’est bien notre pasteur ? demanda Goodman Gray au sacristain.

— C’est certainement le bon M. Hooper, répondit le sacristain. Il devait échanger sa chaire contre celle du pasteur Shute, de Westbury ; mais le pasteur Shute s’est fait excuser hier, devant prêcher à un enterrement.

La cause de tant d’étonnement paraîtra peut-être assez futile. M. Hooper, homme distingué d’environ trente ans, bien qu’étant encore célibataire, était vêtu avec une simplicité toute cléricale, comme si une épouse soigneuse eût empesé son rabat et enlevé de son vêtement du dimanche la poussière de la semaine. Son aspect ne présentait qu’une chose de remarquable : M. Hooper portait un long voile noir qui enserrait étroitement son front et retombait si bas sur son visage que sa respiration le soulevait. Vu de plus près, ce voile semblait consister en une double épaisseur de crêpe, qui cachait entièrement ses traits, à l’exception de sa bouche et de son menton, mais n’interceptait sans doute pas la vue, si ce n’est en prêtant un aspect sombre à tous les objets animés et inanimés.

Protégé par ce triste voile, le bon M. Hooper continuait à avancer d’une allure lente et tranquille ; il se courbait légèrement en avant et semblait considérer le sol, comme les hommes distraits ont coutume de le faire ; mais il adressa un salut amical à ceux de ses paroissiens qui l’attendaient toujours sur les marches de l’église. Ceux-ci étaient si médusés qu’ils lui rendirent à peine son salut.

— Je ne puis vraiment pas croire que le visage du bon M. Hooper soit derrière ce crêpe, dit le sacristain.

— Je n’aime pas ça, marmotta une vieille femme en pénétrant clopin-clopant dans l’église. Il s’est transformé en quelque chose d’affreux, simplement en se cachant le visage.

— Notre pasteur est devenu fou ! s’écria Goodman Gray, en franchissant le seuil à la suite du pasteur.



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