La route by Vassili Grossman

La route by Vassili Grossman

Auteur:Vassili Grossman
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2016-04-13T16:00:00+00:00


IV

À quatre heures de l’après-midi, un conseil technique devait se réunir dans le cabinet du directeur. Sur la convocation, l’ordre du jour mentionnait comme premier objet de discussion : « Où en sommes-nous avec le graphite ? » Les ingénieurs spécialisés entrèrent et s’assirent sur les chaises qu’on avait installées pour eux. Ils avaient traversé les services de comptabilité et de planification dans leurs habits de travail sales, et ils avaient jeté un regard condescendant sur les économistes et sur les planificateurs tirés à quatre épingles. Anokhine et Levine, qui avaient l’intention d’aller à la plage, parlaient à voix basse au chef mécanicien et au responsable de l’atelier de mécanique, le vieux Bobrychev ; ils voulaient les persuader de leur laisser les chaises qui étaient près de la porte, pour pouvoir s’en aller discrètement.

— Asseyez-vous donc sur le canapé, vous serez plus à l’aise, insistait Levine. Mais le chef mécanicien, un Letton têtu que l’on surnommait Nonius, répondit calmement :

— Je suis bien ici, ne vous inquiétez pas pour moi.

Quant à Bobrychev, il ne jurait que par son chef mécanicien. Le visage tout rose sous ses cheveux blancs, il opinait du bonnet avec un bon sourire.

— Laisse tomber ! dit Anokhine agacé. Tu ne vois donc pas ! Ils se croient dans un tramway ! Et en s’asseyant sur le canapé, il murmura : « Quelle bande d’abrutis ! Ce n’est pas étonnant qu’il y ait chaque jour deux machines-outils qui tombent en panne. » Patrikeev arriva ; il fut aussitôt entouré. Il commença à raconter, en élevant la voix et en envoyant des postillons, que le commissariat du peuple avait refusé de signer une licence d’importation du graphite de Ceylan et qu’il avait proposé de le remplacer par une matière première locale. Il donnait des bourrades aux contremaîtres de l’atelier de graphite, il se penchait tantôt vers l’un, tantôt vers l’autre, il les prenait par les épaules, il les regardait dans les yeux et il leur demandait :

— Alors, mon cher, qu’en dites-vous ?

— Je ne peux pas supporter sa façon de s’insinuer dans les bonnes grâces des contremaîtres ! dit Levine.

— Il les craint comme la peste, répondit Anokhine.

Arrivèrent Kvotchine et le secrétaire de cellule.

Patrikeev s’approcha d’eux. Ils s’assirent tous les trois devant la table et commencèrent à discuter à voix basse.

Tout le monde désirait entendre cette conversation. Peut-être qu’en cet instant même Patrikeev chuchote à Kvotchine : « Impossible ! Aujourd’hui, par sa faute, on a encore raté cent grosses de Tip-Tops ! » Kvotchine, indifférent, bâille et acquiesce d’un signe de tête : « Oui, un blâme à l’ordre du jour ! » Et le secrétaire ajoute : « Un blâme sérieux, avec avertissement. » Mais tout le monde entendit le secrétaire Kojine soupirer :

— Si au moins il pouvait pleuvoir !

— Alors, on commence ? demanda Kvotchine.

Il jeta un regard circulaire sur l’assistance, fit un signe de tête au chef mécanicien et frappa sur la table.

— Krougliak n’est pas encore arrivé, dit Korenkov, contremaître du broyage du graphite.



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