La Psychologie collective by Unknown

La Psychologie collective by Unknown

Auteur:Unknown
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Flammarion
Publié: 2015-06-14T16:00:00+00:00


Douzième leçon

La logique des sentiments et le milieu collectif

Après le groupe des six dernières leçons, deuxième partie de ce cours, où nous avons étudié du point de vue sociologique les fonctions intellectuelles, dans leurs formes les plus hautes, mais aussi dans leurs manifestations élémentaires, nous allons poursuivre notre recherche, dans une troisième partie, en nous attachant aux autres facultés de la vie mentale, et d’abord à la sensibilité, aux faits affectifs1.

Ici, nous pourrions observer que les hommes ne sont pas moins étroitement rapprochés par leurs sentiments, leurs émotions et leurs passions que par leurs idées et leurs connaissances. Sentiments religieux, familiaux, patriotiques, politiques, et tous ceux qui naissent à l’occasion des rapports économiques : il y a là un vaste domaine à explorer pour la science sociale2. Mais ici, comme précédemment, nous réservons l’étude des sociologies particulières, de la psychologie des divers groupes. Nous restons dans les cadres de la psychologie classique : c’est l’affectivité dans sa nature générale, telle que l’envisage la psychologie individuelle, que nous devons examiner3.

Observons, d’abord, que les faits affectifs paraissent plus directement liés que tous les autres états et mouvements psychiques au corps, à l’organisme et à sa structure, quelle que soit d’ailleurs la théorie par laquelle on les explique. Par là, ils relèvent de l’étude de l’espèce humaine, telle qu’elle se réalise chez les hommes individuels en un grand nombre d’exemplaires identiques d’un même type biologique. Certes, il y a bien des façons de jouir et de souffrir, bien des différences dans la façon d’éprouver les principales émotions, bien des nuances dans les sentiments, des diversités dans les passions. Mais, dans la mesure où elles résultent de la variété des tempéraments, comme ceux-ci se peuvent classer en quelques groupes, elles caractérisent des subdivisions de l’espèce humaine qui sont indépendantes du milieu social. C’est le destin de l’homme, de tout homme, quels que soient sa condition ou son entourage, de connaître le plaisir, la douleur, d’aimer, de haïr, d’envier, d’éprouver les joies de [la réussite4], l’amertume de l’insuccès, de passer par des alternatives d’espoir et de déception. Il y a des joies et des tourments naturels, parce qu’ils sont conformes à la nature de notre espèce et, quand nous en faisons l’expérience, il semble que nous explorions un domaine commun à tous les hommes, et que des lois imprescriptibles, et qui s’imposent à tous, déterminent à la fois la série des biens et des maux qui nous sont réservés.

Pourtant, et d’autre part, il n’y a rien qui, plus que ces états affectifs, paraisse nous distinguer des autres, et nous faire comme un destin à part au milieu d’eux. Une forte passion isole celui qu’elle domine, le retranche de la communauté, absorbé qu’il est en lui-même, comme si rien n’existait plus pour lui hors de l’objet de son désir. Mais il en est de même d’une grande joie, d’une douleur intense. Certes nos sentiments, le plus souvent, s’expliquent par les autres. Mais, si nous écartons les sentiments sociaux, c’est avec un individu, considéré dans ses traits personnels, dans sa nature propre, qu’ils nous mettent en rapport.



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