La Promesse d'Emile by Bergeron Claire

Auteur:Bergeron Claire [Claire, Bergeron]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fiction
Éditeur: France Loisirs
Publié: 2011-12-31T16:00:00+00:00

14

Abitibi-Tétniscamingue, Noël 1990

Au matin, le soleil se présenta le premier à la résidence d’Émile Caron. Il y avait bien longtemps que la température n’avait été aussi douce le jour de la Nativité.

Émile et Joséphine s’étaient levés tôt et ils avaient dressé la table pour la réception. Ils avaient décoré la maison de banderoles vertes, rouges et argentées, et disposé des branches de conifères sur le chambranle des fenêtres. La maison embaumait la bonne odeur du sapin. Une vague de cafard submergeait souvent Émile, qu’il s’empressait de chasser. Il ne voulait pas atténuer l’immense bonheur qu’il ressentait en s’apprêtant à accueillir les siens. Joséphine avait choisi d’inviter ses parents au jour de l’An, par souci de préserver l’intimité de la famille Caron ; cet intermède de festivités et d’amour partagé serait un réconfort pour eux, qui avaient tous enduré tellement de souffrances.

Véronique arriva la première avec ses enfants. Impatients de recevoir leurs cadeaux, les jeunes jetaient des regards éblouis vers le sapin au pied duquel s’entassaient de nombreux paquets multicolores.

— Mathieu et Virginie me pressaient depuis le début de la matinée pour se rendre chez leur oncle, dit-elle en riant.

Avec la résilience propre aux enfants, les deux petits parvenaient à mettre en veilleuse le décès de leur père et à donner libre cours à l’enthousiasme que suscitait chez eux la fête de Noël. En se jetant dans les bras d’Émile, Mathieu eut une pensée pour Richard.

— Tu as l’odeur de papa, murmura-t-il à son oreille.

Émile le pressa plus fort contre lui. Le départ de son jumeau l’affectait encore terriblement. Comment avait-il pu ne pas se rendre compte de l’intensité de sa douleur ? Il n’avait perçu que sa dépendance à l’alcool sans voir que c’était la pointe d’un iceberg et que son mal de vivre était ancré dans les profondeurs de son être.

L’oncle déposa son neveu par terre et ferma les yeux un bref instant. Il avait lui-même fait la triste expérience de l’intolérable déchirement qui l’avait conduit devant son père dans l’espérance d’un geste ou d’un mot qui aurait réparé l’irréparable, mais c’était une expectative irréaliste. Il allait maintenant devoir en payer le prix.

À midi, la famille au complet était réunie dans le solarium, en face du lac gelé. Une myriade de minuscules glaçons que le vent avait éparpillés sur sa blancheur éclatante lui conférait un incomparable éclat qui le faisait scintiller de mille feux en lui donnant un air de fête. Chaque invité appréciait, ravi, ce moment privilégié qui les réunissait pour la première fois depuis de nombreuses années autour d’une grande table familiale. Seule Fabienne, étendue sur une causeuse, ne participait pas complètement à la fête, ses excès de la veille l’ayant laissée dans un état plus que pitoyable. Invité aux réjouissances, puisque la famille le considérait maintenant comme son compagnon, Gabriel l’observait, mélancolique. Il se sentait impuissant à la comprendre et à l’aider. Sa folle attirance des premières années pour cette jeune personne sémillante se dissipait. Il n’éprouvait plus pour elle qu’un sentiment d’affection teintée d’une irrépressible tristesse.

Télécharger

Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.