La mort dans le grand parc by Wilcox Collin

La mort dans le grand parc by Wilcox Collin

Auteur:Wilcox, Collin
La langue: fra
Format: epub
Tags: Série Noire
Éditeur: Série Noire
Publié: 1973-08-15T00:00:00+00:00


QUINZE

Quand je me le rappelle tel qu’il était hier et que je le vois maintenant, Walter Cross me fait l’effet d’un acteur qui serait passé en coulisse sous l’aspect d’un panouilleur pour en ressortir dans le rôle principal. Il est rasé de frais et ses cheveux coupés à la mode du jour ont reçu le coup de peigne d’un artiste. On le sent tout à fait à l’aise dans son complet élégant et je me rends compte que ses traits délicatement dessinés et son air romantique peuvent avoir de l’attrait pour un certain type de femme sensible et inquiète.

— Vous m’avez l’air cent pour cent mieux, lui dis-je. J’espère que vous vous sentez aussi bien que vous le paraissez.

— J’ai pris un solide petit déjeuner. Des œufs au jambon. Ça vous remet.

— Très bien, dis-je avec un petit sourire. Je ne vous retiendrai pas longtemps, monsieur Cross. Je voulais surtout vous demander si vous vous rappeliez des détails qui puissent nous éclairer sur le passé de June Towers.

Pendant que je lui parle, je me rends compte que ma question est inutile. Je ne cesse de penser à Randall Grant devenu soudain un autre suspect. Grant a un mobile et ses relations avec la victime peuvent expliquer les trois cents dollars clandestins. C’est probablement un emporté, sans doute capable de violence. Il a peut-être même un casier judiciaire… ce que j’aurais dû vérifier.

Mais Randall Grant a également un alibi : sa femme, qui sera bientôt son ex-femme, donc un témoin d’autant plus valable. La haine non déguisée qu’ils éprouvent l’un pour l’autre pourrait même renforcer la défense de Grant.

— … vous ai dit hier tout ce que je savais, lieutenant, achève Cross. Je ne vois sincèrement pas ce que je pourrais ajouter.

Reprenant mes esprits, je reviens à lui.

— Vous a-t-elle parlé de sa vie chez ses parents ? De sa mère… ou de son beau-père ?

— Comme je le disais hier, lieutenant, soupire-t-il d’un air à la fois las et patient, je n’avais pratiquement pas affaire à cette fille. Même après la… disparition de ma femme, et June était alors très souvent avec Steffie et moi-même, je lui parlais fort peu en fait. Elle et Steffie étaient presque toujours ensemble, à bavarder dans la chambre de la petite. C’était merveilleux pour Steffie, bien sûr. Elle… (Au souvenir de sa belle-fille, une expression de souffrance assombrit soudain son regard. Il fait une grimace et détourne les yeux.) June était une fille très tranquille, lieutenant, poursuit-il à voix basse. Très tranquille. Très réservée… Je ne sais vraiment pas grand-chose d’elle.

— Elle était peut-être réservée, mais les renseignements que nous avons indiquent qu’elle n’était pas tellement pudique. Avez-vous quelque chose à nous dire à ce sujet ?

— Non, rien. Mais j’imagine que, de nos jours, le terme pudique est une question d’appréciation.

— Vous avez sans doute raison, dis-je en formulant soigneusement la question suivante… Pendant un certain temps, June Towers a fait, en quelque sorte, partie de votre famille. Elle était très souvent chez vous. Vous la voyiez chaque jour. C’est bien exact ?

— Oui, c’est exact, répond-il en fronçant légèrement les sourcils.



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