La croissance verte contre la nature by Hélène TORDJMAN

La croissance verte contre la nature by Hélène TORDJMAN

Auteur:Hélène TORDJMAN [Tordjman, Hélène]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Sciences humaines et sociales
Éditeur: La Découverte
Publié: 2021-03-10T00:00:00+00:00


L’émergence d’une gouvernance internationale : le pouvoir de la « soft law »

L’environnementalisme de marché est porté par des réseaux d’acteurs, agences des Nations unies, États, firmes transnationales, scientifiques venant de la recherche publique et privée, grandes ONG de conservation et, quelquefois, militaires. Le foisonnement institutionnel et les multiples relations entre tous ces acteurs sont tels qu’il est impossible d’en dresser une cartographie en quelques pages. Je vais cependant tenter une esquisse, pour mettre en lumière le mode de prise de décision qui caractérise aujourd’hui la gouvernance internationale de la protection de la nature. Il est en effet frappant de constater que, une fois encore, les évolutions qu’on vient d’évoquer sont actées sans que les peuples soient consultés, ni même informés. Ainsi, l’approche financière du capital naturel et de sa valorisation s’est très vite diffusée dans les arènes internationales et forme désormais le cadre d’interprétation de la gestion de la crise écologique. Les politiques nationales s’inscrivent ensuite dans ce schéma de pensée, et les parlements ne peuvent plus se prononcer que sur des aspects de détail concernant la forme que doit prendre la transcription dans les droits nationaux des grandes lignes formulées par la Convention sur la diversité biologique, la Commission européenne ou le Programme des Nations unies pour l’environnement (PNUE). Ces grandes lignes elles-mêmes et les termes dans lesquels les débats sont posés ne peuvent plus être discutés par les pouvoirs législatifs nationaux : les principes fondamentaux de la loi émanent avant tout de normes définies par ces nébuleuses d’acteurs, d’où le terme de soft law. La légitimité politique d’une telle loi est problématique, dans la mesure où la grande majorité de ces acteurs ne sont pas élus. Ils décident néanmoins d’un chemin collectif pour nous tous, humains et non-humains.

De plus, l’inflexion des politiques de conservation a conduit à l’entrée de nouveaux acteurs dans les arènes de discussion, des acteurs du secteur privé : grandes firmes, banques, gestionnaires de fonds, soit par le biais d’institutions philanthropiques comme les fondations Rockefeller ou Gates, soit directement, soit encore à travers le groupement en associations comme le World Business Council on Sustainable Development, modifiant les équilibres entre États et secteur privé. L’articulation entre public et privé s’opère à deux niveaux. Le premier est celui de grands projets et d’associations globales dont le statut juridique est non identifié, ce qui ne les empêche pas de produire des normes qui influenceront ensuite les pratiques juridiques et économiques. À un second niveau plus microéconomique, on trouve les inévitables partenariats public-privé (PPP) créés pour mettre en œuvre des projets précis s’inscrivant dans ces normes générales. Ainsi, pour schématiser, la hiérarchie du paysage institutionnel de la conservation comporte trois niveaux : celui des grandes agences internationales appartenant à l’ONU ; celui de ces objets institutionnels non identifiés, appelés « forums multi-parties prenantes » ; et enfin celui des partenariats public-privé développant des projets de conservation particuliers. Examinons-les tour à tour.



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