La charge sexuelle by Clémentine GALLOT

La charge sexuelle by Clémentine GALLOT

Auteur:Clémentine GALLOT [GALLOT, Clémentine]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Sexualité
Éditeur: First
Publié: 2020-04-16T00:00:00+00:00


Un corps à distance

Le corps de l’autre mérite-t-il notre attention au point de négliger nos propres sensations ? Un autre paradoxe s’offre à nous : objet sexuel (comme évoqué dans les chapitres précédents), le corps féminin serait pourtant absent à lui-même. À la fois dévoilé et dissimulé. « Dès leur plus jeune âge, les filles acquièrent une série de subtiles habitudes relatives à leur comportement physique ; elles apprennent à marcher comme une fille (à petits pas), à s’asseoir comme une fille (les jambes serrées), à acquérir une gestuelle de fille (retenue et gracieuse), etc. Ayant intériorisé la nécessité d’entraver leurs mouvements, elles développent une timidité corporelle qui ne les quittera pas, leur rapport à l’espace sera ainsi placé sous le signe de la retenue, quand ce n’est pas de la crainte », écrit la chercheuse Camille Froidevaux-Metterie dans son ouvrage Le Corps des femmes : la bataille de l’intime17, qui postule que c’est parce que le corps de la femme s’est longtemps cantonné à la sphère privée – l’épouse lave et repasse, que les femmes ne se sentent pas légitimes « au dehors ». Dans son ouvrage, l’autrice développe et notifie que « la corporéité féminine se conçoit d’abord dans les termes de la passivité. Si les femmes n’explorent pas toute leur potentialité corporelle, c’est qu’elles ont intériorisé un principe de dissociation qui fait de leur corps un objet quasiment distinct d’elle. Cette logique s’enracine dans l’expérience séculaire et quotidienne du regard de l’autre. Le corps des femmes ne cesse jamais d’être un objet de scrutation, et c’est parce qu’il est ainsi regardé qu’il n’existe que passivement : il est touché plutôt qu’il ne touche, saisi plutôt qu’il ne saisit, bougé plus qu’il ne bouge ». Est-il besoin de rappeler que le corps féminin, durant l’acte sexuel, est on ne peut plus présent et actif ? Le vagin, lors de la pénétration, n’est pas qu’un réceptacle, au contraire, il enserre le pénis. Le périnée se contracte involontairement. Le clitoris, lui aussi, entre en érection.

Ce rapport social au corps, sans doute à l’origine des menstruations prises en grippe, des complexes physiques, des troubles du comportement alimentaire, peut venir expliquer en partie cet impensé, celui d’accompagner son propre corps vers le plaisir. Si certaines femmes sont curieuses de leur anatomie et connaissent leur corps, ses particularités et ses zones volcaniques, d’autres ne se découvrent pas, par manque d’aise, d’envie, de besoin, ou encore d’assurance. On peut alors émettre l’hypothèse qu’un certain retrait envers soi-même incite les femmes à focaliser leur attention sur le corps de leur partenaire, décrit, lui, comme sexuellement actif.

La négociation avec les injonctions contradictoires est la suivante : si le corps féminin n’existe que « passivement », on ne peut à l’inverse prétendre que les femmes sont passives dans l’intimité. Elles ne sont pas toujours présentes à elles-mêmes mais présentes au rapport. Mais pour qui ? L’idée selon laquelle les hommes sont « visuels » inciterait encore davantage les femmes à soigner leur apparence, leur attitude, et à garder la lumière allumée.



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