La chèvre de bois by Maryse Rouy

La chèvre de bois by Maryse Rouy

Auteur:Maryse Rouy [Rouy, Maryse]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
Publié: 2007-04-13T12:59:37+00:00


7

LA VIE À LA FERME

Patrick s’habitua peu à peu à sa nouvelle vie. Auguste Tiffault – qu’on lui avait dit d’appeler « père » – était sévère et souriait rarement, même à sa femme et à ses filles, mais il ne punissait pas non plus injustement. De lui, Patrick apprit les travaux de la ferme, mais peu de français : il ne lui disait que les mots indispensables à la compréhension de ses tâches.

Avec la mère, c’était différent. Ils passaient tous les matins un moment seuls, dans la cuisine, avant que le père ne se lève, et elle lui faisait répéter le nom des objets du quotidien. Quand il se hasarda à faire des phrases, elle le corrigea gentiment. Il progressa plus vite qu’à l’orphelinat parce qu’il n’avait pas souvent l’occasion de parler anglais. À Sainte-Famille, il n’entendait sa langue maternelle que le dimanche, lorsque le curé lui adressait la parole en anglais. Davantage, semblait-il, pour montrer à ses paroissiens qu’il connaissait la langue que par désir de l’entretenir chez le garçon. D’ailleurs, il se contentait d’une phrase ou deux, puis l’interrogeait en français pour mesurer ses progrès.

C’était lors de sa visite hebdomadaire à Québec que Patrick parlait anglais. Une fois par semaine, Auguste se rendait en ville pour vendre les produits de la ferme. Il mettait dans des cageots les légumes du jardin – oignons, fèves, pommes de terre et courges –, parfois une ou deux volailles, quelques fromages, des pommes ou des bleuets. Les marchandises étaient chargées sur la carriole, puis dans la barque qu’il laissait sur la grève à côté du ponton. À Québec, sur la charrette à bras appartenant à un homme avec lequel il s’était entendu, il transportait le tout au marché couvert de la Basse-Ville où les ménagères venaient s’approvisionner.

Dès son premier jour de marché, Patrick, voyant que le père manquait de mots pour répondre à une cliente anglophone s’enquérant de la fraîcheur des produits, prit spontanément la parole pour expliquer que les légumes avaient été cueillis le matin même. Ravie d’être servie en anglais, la bourgeoise leur envoya ses amies. Auguste le félicita et Patrick en ressentit de la fierté.

Pour retourner à Sainte-Famille, il fallait attendre la marée. Auguste Tiffault passait ces quelques heures à l’auberge, où il retrouvait d’autres habitants du village. Ils parlaient politique en fumant la pipe et en buvant du fort. La première fois, Patrick resta là à s’ennuyer, n’osant pas s’éloigner de crainte de rater le départ. Mais la fois suivante, ayant compris qu’il avait une bonne marge de temps, il s’éclipsa et partit à la recherche de l’orphelinat.

Il n’y serait pas parvenu seul, mais des passants obligeants le renseignèrent, et il retrouva le bâtiment qui l’avait tant impressionné lorsqu’il l’avait découvert en arrivant de la Grosse-Île. Il hésita beaucoup avant de frapper, ne sachant comment il serait reçu. Quand il s’y décida, son apparition provoqua un fameux remue-ménage. Sœur Catherine lui fit subir un interrogatoire serré, et Patrick se rendit compte qu’elle croyait qu’il s’était enfui. Il



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