Juger la reine by Emmanuel de Waresquiel

Juger la reine by Emmanuel de Waresquiel

Auteur:Emmanuel de Waresquiel [Waresquiel, Emmanuel de]
La langue: fra
Format: mobi
Tags: Essai, Histoire, Révolution
Éditeur: Tallandier
Publié: 2016-09-06T22:00:00+00:00


Hébert a ses preuves. Le 14 octobre dans l’après-midi, il est sûr de l’effet qu’il va produire. Appelé à la barre, il évoque d’abord diverses péripéties de la vie de l’accusée puis il en vient au fait. Il parle de ce qu’il appelle les « pollutions indécentes » du petit Capet, explique qu’il y avait été initié par sa mère et par sa tante. Puis il en arrive au pire. Des déclarations faites par l’enfant, explique-t-il à l’intention du président Herman et sous l’œil attentif de Fouquier, « il résulte que ces deux femmes le faisaient souvent coucher entre elles deux ; que là il se commettait des traits de la débauche la plus effrénée ; qu’il n’y avait pas même à douter, par ce qu’a dit le fils Capet, qu’il y ait eu un acte incestueux entre la mère et le fils 1 ». Ce n’est pas tout. Hébert, probablement désireux de montrer qu’il est intelligent, ne se contente pas d’accuser, il argumente. Marie-Antoinette ne couchait pas seulement avec son fils par plaisir, explique-t-il, mais également pour des raisons politiques, avec l’intention machiavélique d’« énerver le physique » de l’enfant pour mieux le dominer. A-t-il regardé l’accusée en disant cela ? Au moins les horreurs assenées en pleine face ont-elles l’excuse du courage des salauds. Dans quelques mois, Hébert gémira et se tordra dans tous les sens quand à son tour il devra marcher à la guillotine. Et on se moquera de lui.

*

Sur le coup, Marie-Antoinette ne réagit pas. Elle a dû être tellement secouée par le récit d’Hébert qu’elle a fait comme si elle ne l’avait pas entendu. Il faudra que l’un des jurés revienne à la charge et lui intime l’ordre de répondre pour qu’elle se tourne vers l’auditoire et prononce les mots que l’on sait, de ceux qui sont restés dans toutes les mémoires, au point qu’ils nous ont fait oublier le reste : « Si je n’ai pas répondu, c’est que la nature se refuse à répondre à une pareille inculpation faite à une mère. J’en appelle à toutes celles qui peuvent se trouver ici. » « Ici, lit-on encore, l’accusée paraît vivement émue 1. » Elle rougit, laisse s’échapper une larme 2. Un témoin parle du « ton dramatique » de son apostrophe au public 3. Un peu plus tard, une fois l’émotion passée, elle dira nettement, et plus que jamais en mère, ce qu’elle pense des interrogatoires de son fils : « Il est bien aisé de faire dire à un enfant de 8 ans tout ce que l’on veut 4. »

Très vite d’autres versions de sa réponse à Hébert vont circuler dans le public. La mémorialiste anglaise Helen Maria Williams, qui était présente à Paris à ce moment-là, en a retenu une et c’est celle-là qui est restée : « J’en appelle à toutes les mères qui sont dans l’assemblée et je leur demande de déclarer si parmi elles, il s’en trouve une que la seule idée de ces horreurs ne fait pas frémir 5.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.