Journal d'une tueuse (Sans Visage) (French Edition) by V.I. Prates

Journal d'une tueuse (Sans Visage) (French Edition) by V.I. Prates

Auteur:V.I. Prates [Prates, V.I.]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Rebelle Editions
Publié: 2015-07-13T22:00:00+00:00


22

Shane revint quelques heures plus tard. J’avais repris place dans la cuisine et Mam faisait la vaisselle. Nous ne parlâmes pratiquement plus. Elle m’avait posé deux ou trois questions à mon retour, mais en voyant que je ne répondais que par monosyllabes, elle avait préféré me laisser seule avec mes pensées. J’en fus heureuse, je ne voulais pas entretenir une conversation, j’avais l’esprit ailleurs. J’avais réussi à reprendre le contrôle de mes émotions, ou de mes non-émotions. Je travaillai dur pour tout jeter dans un coin obscur de ma tête et me fixai à nouveau sur ma mission. Shane me scruta avec curiosité. Peut-être sentit-il que quelque chose m’avait bouleversée. Ou peut-être pas. Quoi qu’il en soit, il ne s’en inquiéta pas. Il me regarda avec froideur, puis s’approcha de Mam.

— Tout s’est bien passé ?

Il avait parlé d’une voix très douce, qui me surprit.

— Absolument, Shane, répondit-elle, de bonne humeur. Débée est une gentille fille, elle m’a même assistée pendant l’opération.

— L’opération ?

Mam lui raconta alors la mésaventure avec le chiot. Shane me regarda du coin de l’œil pendant une minute, puis reporta à nouveau toute son attention sur elle. Je compris ce que son expression sous-entendait. Pour lui, mon aide n’avait été qu’une nouvelle façon de manipuler mon entourage et son regard reprochait à Mam de s’être laissée berner. Sauf que cette critique silencieuse n’eut aucun effet sur la vieille femme. Elle se fichait totalement de ce qu’il pensait, car elle s’était faite son idée sur moi, et c’était plutôt positif. Un instant, j’eus envie de lui sourire, mais ne le fis pas. Ça aurait pu être mal interprété.

— Très bien, Débée. Puisque tu as fait ta bonne action de la journée, je suppose qu’il faut s’attendre au pire à partir de maintenant.

Mam lui donna une tape sur le bras. Une caresse, évaluai-je.

— Arrête d’être désagréable ! l’admonesta-t-elle. Tu te trompes sur elle, c’est quelqu’un de fragile.

Shane fut pris d’un fou rire, un vrai. J’aurais pu le prendre mal, sauf qu’il avait raison. Je pouvais être tout sauf fragile.

— Ah, ma douce Mam, tu ne vois toujours que la bonté chez les gens. Tu ne fouilles pas assez.

Lui riait toujours, elle, croisait les bras, fâchée. Ou faussement fâchée. Elle avait une affection particulière pour lui, cela se voyait. Je me fis toute petite. Je me sentais mal à l’aise devant cette scène familiale. J’étais incompatible avec l’idée de bonheur.

— Allez viens, Débée, finit-il par me dire après s’être légèrement calmé. On nous attend. Ou plutôt, on m’attend, mais vu que je suis obligé de me farcir ta présence…

— Si elle t’embête tant que ça, pourquoi ne la laisses-tu pas partir ? demanda Mam, en toute innocence.

— Parce qu’elle ne le souhaite pas, expliqua-t-il avec douceur. Elle ne s’est pas enfuie de la prison, malgré toutes les possibilités de fugue que j’avais laissées à sa disposition. Elle est forte, elle est entraînée et il n’y a pas de barreaux à la fenêtre. Juste un double vitrage. Si elle avait voulu s’enfuir, elle aurait pu le faire.



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