Jihad Academy (Fayard, 25 février) by Hénin Nicolas

Jihad Academy (Fayard, 25 février) by Hénin Nicolas

Auteur:Hénin, Nicolas [Hénin, Nicolas]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai
Éditeur: Fayard
Publié: 2015-03-15T16:00:00+00:00


C’est dans ces circonstances que l’État islamique décide, au printemps 2013, de lancer une OPA sur le Jabhat al-Nosra. Un jeune djihadiste européen qui faisait partie de mes geôliers s’était évertué à m’expliquer la légitimité de cette opération, soutenant que le Jabhat al-Nosra n’était qu’une émanation de ce qui était à l’époque l’État islamique en Irak, et que la fusion n’avait été lancée qu’au moment où Abou Mohammed al-Jolani, l’émir de la franchise officielle d’al-Qaeda, avait affiché trop haut son intention de prendre le large.

Mais le conflit entre Abou Bakr al-Baghdadi et Jolani, qui finit par en appeler à Ayman al-Zawahiri, lequel lui donne raison, montre qu’il s’agit d’une compétition entre deux groupes beaucoup plus concurrents que partenaires. D’ailleurs, au moment où le divorce se profile, et alors qu’à partir du mois de mai les émirs locaux d’al-Nosra sont appelés soit à renouveler leur allégeance à Jolani, soit, au contraire, à rejoindre l’État islamique, les deux mouvements cherchent à faire bonne figure. Mais un divorce, dans une famille conservatrice, fait toujours désordre. Les deux anciens partenaires finissent sans surprise par se déchirer autour du partage des biens communs, ce qui les conduit à s’affronter militairement durant l’hiver. Aujourd’hui, les relations entre le Jabhat al-Nosra et l’État islamique sont toujours complexes. Elles se résument d’une façon générale à un rapport de concurrence, avec ponctuellement des combats, mais aussi ici et là des alliances. Comme toujours, comme partout, ce sont au moins autant les circonstances de terrain qui dictent les comportements que les consignes d’état-major.

On ne présente plus guère Abou Bakr al-Baghdadi, qui a déjà fait l’objet de nombreux articles dans les médias. On le pense né à Samarra, au nord de Bagdad, en 1971. Il aurait été diplômé d’études islamiques à l’université de Bagdad. Il a dirigé le comité juridique du Conseil de la shura des moudjahidines, une coalition de groupes insurgés islamistes irakiens. Ce que l’on retiendra surtout de son parcours, c’est sa probable incarcération à Camp Bucca, l’un des principaux camps de détention militaires américains, situé dans le désert, à la frontière irako-koweïtienne. Les informations disponibles (on devrait presque parler de rumeurs tellement les sources ouvertes sur le personnage sont ténues) font état soit d’une incarcération entre les mois de février et décembre 2004, soit de 2005 à 2009. Quelle que soit la réalité, plusieurs membres de l’état-major de l’État islamique seraient ainsi des « vétérans » de Camp Bucca. J’ai pu constater que nombre de djihadistes que j’ai rencontrés ont connu des épisodes d’incarcération. Même l’un des principaux émirs en charge de ma captivité, un Irakien, se prévalait d’une détention pendant ses années de guérilla anti-américaine. Un autre geôlier prétendait même avoir été emprisonné pendant des années à Guantanamo. Les prisons du régime syrien, comme les camps d’internement de l’armée américaine en Irak, auront finalement constitué pour beaucoup une très bonne « Jihad academy ».

L’événement qui change la donne est la chute de larges pans du territoire irakien aux mains de l’État islamique. La conquête de Mossoul, qui tombe en quelques jours après la déroute de l’armée, est un électrochoc.



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