Jeanne d'Arc Vérités et légendes by Colette Beaune

Jeanne d'Arc Vérités et légendes by Colette Beaune

Auteur:Colette Beaune [Beaune, Colette]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman Historique
ISBN: 9782262029517
Éditeur: Alexandriz
Publié: 2008-01-23T10:08:23+00:00


Jalousée par les capitaines ?

Il fallut donc trouver d’autres coupables. La chronique exactement contemporaine de Perceval de Cagny, qui émane du camp armagnac, désigne très clairement « certains conseillers » royaux comme hostiles à la Pucelle et dénonce globalement l’« envie des autres capitaines » comme responsable des difficultés de Jeanne après le sacre. Mathieu Thomassin, la chronique de Lorraine, la chronique de P. Cochon, la chronique de Tournai s’en tiennent comme Perceval à des accusations collectives. Le doyen de Saint-Thiébaut vise nommément le favori Georges de La Trémoille, « qui n’était mie bien loyal au roi ; il avait envie des faits qu’elle faisait et fut coupable de sa prise ».

L’envie est traditionnellement au deuxième rang dans la liste des sept péchés capitaux[47]. L’envieux regarde d’un mauvais œil les succès d’autrui, qui lui font concurrence. Il se met à diffamer celui qu’il jalouse et à en préparer secrètement la perte. Serait-ce un péché des classes inférieures, paysans ou artisans, de ceux qui n’ont ni richesse, ni position sociale, ni renommée ? Le Moyen ge n’en est pas sûr. Les lieux où l’envie règne en maître sont plutôt, pour lui, l’université de Paris (il est probable que les juges de Jeanne envient son charisme) et la cour royale. C’est là en effet que se distribuent les faveurs du prince, les honneurs, les richesses et les commandements militaires.

L’armée royale, succursale, si l’on peut dire, de la Cour, était aussi un des hauts lieux de l’envie. Pour des raisons diverses : les capitaines étaient par naissance dépendants de tel ou tel prince. Ils en recevaient fiefs ou pensions. Ils commençaient souvent leur carrière au service du prince, avant de passer à celui du roi. Mais ils restaient liés à leur ancien maître, qui pouvait au Conseil favoriser leur avancement ou lui nuire. Il y avait donc des capitaines armagnacs, d’autres angevins, d’autres bourbonnais… Comme l’avancement ne faisait guère encore l’objet de règles bien nettes, les postes et le versement des soldes restaient liés davantage à la faveur et au sang qu’à la compétence ou à l’ancienneté. Même fort jeune, un prince se voyait confier une armée, quitte à être flanqué, quand même, d’un professionnel expérimenté.

Quand Jeanne d’Arc parut, les capitaines durent composer. Femme et paysanne, elle n’avait pas le profil viril et nobiliaire nécessaire, selon eux, à l’emploi. Ils voulaient bien d’elle comme porte-étendard, mais guère plus. Seuls Alençon, La Hire, Poton, tous armagnacs, étaient mieux disposés. Mais les autres, non. Ils devaient s’effacer devant une jeunesse, eux qui avaient une solide expérience acquise à la force du poignet. Tous les soldats qui lui étaient attribués leur échappaient, toutes les soldes aussi. Elle avait des initiatives qui leur semblaient absurdes. Et surtout, après la victoire, on ne parlerait que d’elle, toute leur participation, tous leurs efforts passeraient inaperçus. Qui se souvient encore aujourd’hui que la victoire d’Orléans a été une réussite collective où l’armée de secours confiée à Dunois et la garnison commandée par Raoul de Gaucourt ont aussi joué un rôle



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