Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage by Angelou Maya

Je sais pourquoi chante l'oiseau en cage by Angelou Maya

Auteur:Angelou Maya [Maya, Angelou]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Américaine
ISBN: 9782253127536
Google: _mEmDgAAQBAJ
Éditeur: Le Livre de Poche
Publié: 1969-01-29T23:00:00+00:00


22

Le vent balayait le toit, dérangeant les tuiles d’ardoises. Il sifflait dur sous la porte close. Envahie de bourrasques insistantes, la cheminée émettait de terrifiantes protestations.

À quinze cents mètres de là, le vieux Kansas City Kate (le train très admiré mais trop important pour s’arrêter à Stamps) traversa avec fracas la ville en sifflant ses tut-tut avertisseurs et, sans un regard en arrière, fila vers une fascinante destination inconnue.

Une tempête s’annonçait : une nuit idéale pour relire Jane Eyre. Ses corvées terminées, Bailey se réfugia immédiatement derrière le poêle avec Mark Twain. Ce soir, c’était à mon tour de fermer le Magasin et mon livre, déjà à moitié relu, m’attendait sur le comptoir des bonbons. Puisque le temps s’annonçait mauvais, j’étais sûre qu’Oncle Willie m’approuverait, en fait m’encouragerait, à fermer tôt (économie d’électricité) et à rejoindre la famille dans la chambre de Momma qui faisait fonction de salle commune. Peu de gens se risqueraient dehors avec cette menace de tornade (car, bien que le vent soufflât, le ciel était aussi clair et calme que par un matin d’été). Momma convint qu’il valait mieux, tant qu’à faire, que je ferme, et je sortis sur la véranda, tirai les volets, glissai la barre de bois sur la porte et éteignis la lumière.

Les casseroles s’entrechoquaient dans la cuisine où Momma faisait frire des beignets pour accompagner la soupe de légumes du dîner, et les odeurs et les sons familiers m’enveloppaient douillettement tandis que je lisais l’histoire de Jane Eyre dans le château anglais et glacial d’un gentleman encore plus glacial. Oncle Willie était plongé dans L’Almanach, sa lecture quotidienne du soir, et, très loin, mon frère descendait le Mississippi sur un radeau.

Je fus la première à entendre vibrer la porte de derrière. Une vibration et un coup, un coup et une vibration. Mais, soupçonnant qu’il pouvait bien s’agir de la femme folle dans la tour, je n’y crus pas. Puis Oncle Willie entendit et fit revenir Bailey de chez Huck Finn pour aller tirer le verrou.

Par la porte ouverte, le clair de lune tomba dans la pièce, froid rayonnement rivalisant avec notre maigre lumière. Nous attendîmes tous – moi avec effroi –, car aucun être humain ne se trouvait là. Seul le vent s’engouffra pour se battre avec la faible flamme de la lampe à pétrole, poussant et bousculant la chaleur familiale de notre poêle ventru. Oncle Willie pensa que le bruit était venu de la tempête et ordonna à Bailey de refermer la porte. Mais, juste avant qu’il n’eût repoussé le grossier loquet de bois, une voix s’infiltra dans l’entrebâillement :

– Sister Henderson ? Brother Willie ? soufflat-elle d’un ton rauque.

Bailey faillit refermer la porte aussitôt, mais « Qui est-ce ? » interrogea Oncle Willie, et le visage brun transi de M. George Taylor émergea de la grisaille. L’homme s’assura que nous n’étions pas couchés et entra. Dès qu’elle le vit, Momma l’invita à rester dîner et me demanda d’enfouir quelques patates douces sous la cendre pour étoffer le menu du soir.



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