Huit quartiers de roture by Calet Henri

Huit quartiers de roture by Calet Henri

Auteur:Calet, Henri
La langue: fra
Format: epub
Tags: Chroniques
Éditeur: Le dilettante
Publié: 2015-03-25T16:00:00+00:00


C’est peut-être la catastrophe des Couronnes qui me frappa le plus vivement. J’ai l’impression d’y avoir été mêlé personnellement et, pourtant, je n’étais pas encore au monde lorsqu’elle a eu lieu, en 1903, au mois d’août. Mais j’en entendis souvent parler autour de moi, avec effroi. Couronnes, ce nom mortuaire et comme prédestiné.

J’eus la chance, dernièrement, de retrouver une collection incomplète de La Vie illustrée, de l’année 1903. L’accident y est relaté sous la manchette : « La catastrophe du métropolitain. » Sur la couverture, on voit un dessin « d’après nature » qui montre la découverte de soixante-quinze cadavres sur le quai de la gare des Couronnes. La scène est éclairée sinistrement par la lueur fumeuse de torches tenues par des sapeurs-pompiers. Et cependant, le tableau n’est pas aussi attristant que l’on pourrait le craindre. Au contraire, l’artiste – le mot n’est pas trop fort – qui a, ma foi, un joli coup de crayon, a réussi à mettre là-dedans quelque chose de flou, de léger, et même d’un peu leste. C’est tout le charme du temps.

Un long article intitulé « Paris en deuil » donne des détails sur l’événement : deux trains de huit wagons de bois avaient brûlé à la suite d’un court-circuit. Les voyageurs s’étaient trouvés dans une obscurité complète. Il y avait eu, en tout, quatre-vingt-quatre victimes, asphyxiées pour la plupart. Un reporter avisé – M. J.-L. Croze – était allé faire visite aux rescapés et aux parents des morts à qui il avait eu la bonne idée de demander un portrait du disparu. Le reportage, comment dire ?… très vivant, est dans le ton sobre qui convient, ponctué de quelques gentilles larmes. Le journaliste a obtenu une belle photo d’un zouave, ainsi que celle du « watt-man » sur son lit d’hôpital. Le zouave et le wattman ont de fortes moustaches. Un deuxième dessin, également « d’après nature », représente le président Émile Loubet et le général André aux obsèques.

Le général André porte un bicorne à plumes d’autruche. Il était, je crois, assez populaire. On lui doit l’abolition du minimum de taille pour les conscrits. C’est lui aussi qui tomba de cheval pendant une revue du 14 Juillet, à Longchamp. À moins que ce ne fût le général Picquart[79]…

Un poète, Antonin Louis, a écrit de bien jolis roulements de tambour sur ces années glorieuses :

Aimons l’armée avec toute notre âme,

Protégeons-la contre ses ennemis ;

Pour le Pays, entretenons sa flamme.

Et dans ses rangs soyons toujours soumis ;

Comme une mère on n’a qu’une Patrie.

Et ses soldats, ce sont tous ses enfants.

Les fiers Gaulois, dont la race aguerrie,

Lui refera ses drapeaux triomphants[80].



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