Histoire de Sibylle by Octave Feuillet

Histoire de Sibylle by Octave Feuillet

Auteur:Octave Feuillet [Feuillet, Octave]
La langue: fra
Format: epub
Tags: fiction, classique, Europe, France
ISBN: 978-2-8247-1446-2
Éditeur: Bibebook
Publié: 1876-01-01T00:00:00+00:00


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Chapitre 5

L’église de la Madeleine

Un matin, mademoiselle de Férias, accompagnée d’un vieux domestique de sa grand-mère, était allée entendre une messe basse à l’église de la Madeleine, qui était sa paroisse. Elle aperçut à quelques pas d’elle la duchesse Blanche : elle était prosternée sur un prie-Dieu dans une attitude de profonde méditation, et ne parut pas la voir. Sibylle avait passé la soirée de la veille à l’hôtel de Sauves, et y avait reçu de la jeune duchesse des témoignages plus marqués que de coutume de cet intérêt à la fois ardent et répulsif dont le sens était pour elle un mystère, et n’en est plus un pour le lecteur. La présence inattendue de Blanche dans le lieu saint lui causa d’abord un peu de distraction en lui rappelant tout un ordre d’idées et de sentiments qui l’obsédait depuis quelque temps à un haut degré. Cependant elle finit par s’absorber dans une pieuse contention d’esprit, et elle n’en fut tirée que par un bruit de sanglots étouffés qui se faisait entendre près d’elle. La messe était terminée en ce moment et l’église presque déserte. Sibylle, regardant autour d’elle avec inquiétude, n’eut pas de peine à reconnaître que c’était la jeune duchesse qui pleurait : elle avait la tête dans ses deux mains, et ses gants étaient tachés de larmes. Mademoiselle de Férias s’avança aussitôt vers elle et lui dit de sa voix la plus douce :

— Pardon,… vous souffrez ?

Blanche leva brusquement la tête, et la reconnaissant à travers ses pleurs avec une sorte de confusion et de colère :

— Non, mademoiselle, dit-elle sèchement.

Je ne puis vous être bonne à rien ? reprit Sibylle avec timidité.

— À rien, mademoiselle ; merci.

Sibylle, repoussée avec cette rigueur, sentit ses yeux s’emplir de larmes ; elle s’inclina légèrement à la hâte, ramena son voile sur son visage, et, faisant un signe à son vieux domestique, elle gagna la porte de l’église. Elle allait sortir quand une main s’appuya doucement sur son bras et la fit se retourner : elle rencontra le regard de la jeune duchesse, qu’elle crut voir animé d’une expression toute nouvelle :

— Mademoiselle, dit Blanche, je vous ai blessée, n’est-ce pas ?

— Un peu, dit Sibylle en souriant.

— Pardonnez-moi, reprit la jeune femme. Je suis si malheureuse !… Venez me voir aujourd’hui à deux heures, voulez-vous ?… Vous me demanderez,… moi seule !

— Oui, madame, dit Sibylle, dont le cœur battit soudain avec force, j’irai.

Blanche saisit la main de Sibylle, la serra fiévreusement et s’éloigna.

La matinée parut longue à mademoiselle de Férias. Malgré l’obscurité profonde du dédale où s’égarait son esprit, un instinct confus semblait l’avertir qu’elle touchait en ce moment au point le plus vif et le plus délicat de sa destinée. Quand elle se présenta à l’heure dite dans l’appartement de madame de Sauves, elle éprouvait une agitation voisine de l’angoisse.

La jeune duchesse, en la voyant entrer, courut à elle. Ses yeux, entourés de l’ardent sillon creusé par ses pleurs, brillaient d’un éclat extraordinaire. Elle prit les



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