Histoire de l'Italie by Pierre Milza

Histoire de l'Italie by Pierre Milza

Auteur:Pierre Milza [Milza, Pierre]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Histoire
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


L'intermède maniériste

Le maniérisme s'inscrit dans un espace temporel qui va de l'apogée de la Renaissance au début de l'âge baroque. Le mot manierismo a fait son apparition à la fin du XVIIIe siècle, sous la plume du jésuite Luigi Lanzi, archéologue et sous-directeur de la galerie des antiquités de Florence, dans un sens négatif, pour désigner une sorte d'arrière-saison artistique caractérisée par la sophistication excessive des formes et par l'altération du vrai (alterazione del vero). Un siècle plus tôt, Giovanni Pietro Bellori s'était déjà élevé contre ceux qui, abandonnant l'étude de la nature, avaient perverti l'art avec la maniera, définie comme une « idée fantastique fondée sur la pratique et non sur l'imitation ». C'est seulement au XXe siècle que les historiens de l'art procédèrent à une réévaluation de la production artistique – principalement picturale – des années 1520-1580, et à la réhabilitation de créateurs dont l'œuvre avait été considérée jusqu'alors comme « décadente » par rapport à la perfection idéale incarnée par Michel-Ange ou par Raphaël.

Vasari avait été le premier à parler de maniera pour distinguer l'art « ancien » de Giotto (maniera vechia) de l'art « nouveau » de Léonard (maniera moderna), et pour considérer que ce dernier représentait l'apogée de la production picturale. La belle maniera des grands maîtres de la Renaissance classique aurait ainsi exprimé l'idéal « courtois » et raffiné des cours aristocratiques du Cinquecento, un mélange de grâce, de « savoir-faire », d'élégance, de virtuosité et de fantaisie imaginative22. Le maniérisme constituerait dans cette perspective un prolongement de la Renaissance, les artistes s'appliquant à reproduire, avec quelques variantes, les modèles élaborés par Michel-Ange, Raphaël et consorts.

À l'opposé de cette thèse, l'historien de l'art allemand Friedländer – dont les premiers travaux sur cette question datent de 1915 – a interprété le courant maniériste comme une révolte contre l'esthétique de la Renaissance23, une réaction « anticlassique » dont les initiateurs avaient commencé à se manifester vers 1520 autour de Rosso, Pontormo et du Parmigiano et à laquelle Michel-Ange lui-même s'associa dans ses œuvres tardives : préfiguration en quelque sorte de l'esthétique baroque.

De la multiplicité et de la diversité des œuvres réalisées par les artistes maniéristes on peut dégager quelques traits communs : le primat du décoratif, la tendance à l'allongement des formes (particulièrement significatif dans la Madone au long cou du Parmigiano), l'angularité de certaines figures (la Déposition de Rosso), l'abstraction du dessin et de la couleur, l'iconographie compliquée, l'importance attachée par le peintre, le sculpteur ou l'orfèvre (Benvenuto Cellini par exemple) à la beauté et à la perfection des détails24. Tout cela aboutissant chez de nombreux créateurs à une esthétique délibérément excessive, irrationnelle, originale à tout prix et qui témoigne de la crise de la culture italienne, telle qu'elle se manifeste entre le classicisme du début du siècle et le baroque de la Réforme catholique.

Le berceau de la maniera ne pouvait être que la ville où Michel-Ange et Raphaël avaient eux-mêmes ouvert la voie : le premier en offrant aux jeunes artistes, avec la voûte



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