Feuilles volantes (LE DILETTANTE) (French Edition) by Georges Hyvernaud

Auteur:Georges Hyvernaud [Hyvernaud, Georges]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782842635671
Éditeur: Le Dilettante
Publié: 2012-05-28T22:00:00+00:00

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1 Titre de l'auteur. D. = D'Halluin, directeur des Éditions du Scorpion, premier éditeur de La Peau et les Os. Ce texte a paru dans la revue Écrire (dirigée par Jean Guénot).

On

Tous ces textes sont postérieurs à 1950.

Le drame, ce n'est pas moi et moi

Le drame, ce n'est pas moi et moi, ni toi et toi, ni toi et moi. C'est moi et on. Toi et on. Voici venu le temps des on. Des on dit, des on sait, des on fait, des on fait savoir. ON : bien mieux retranché, camouflé, défendu, que les pauvres vieux bons dieux des métaphysiques vermoulues. Il y avait des ressources avec les dieux, ils n'étaient pas exigeants, ils ne prenaient pas toute la place, les hommes pouvaient s'entendre avec les hommes, régler entre hommes leurs affaires d'hommes. Laisser tomber Dieu, après tout. Il n'était pas toujours là, Dieu, dans votre rue, dans votre lit. Il n'avait pas pris ces cent mille noms, ces cent mille voix, inventé de se manifester par des boîtes à musique, des questionnaires imprimés, des fonctionnaires, des flics, des brochures illustrées, des fantômes. Il n'avait pas de guichets, de couloirs, d'escaliers, de salles d'attente, d'initiales, de laboratoires, d'écrans, de chimies, de scopies, de graphies, de haut-parleurs, de rotatives, de barbelés, de crématoires, d'enseignes au néon, de physique nucléaire, d'ascenseurs et de cartes de parti, de wagons à vaches. Il se cachait à peine. Il était au ciel. Les hommes avaient la terre pour y planter des maisons, des arbres, des statues et des pommes de terre, s'y terrer et s'y enterrer. Il y avait Dieu, et s'ils y tenaient les hommes pouvaient lui parler dans des endroits spéciaux, où ils trouvaient des sièges, des cierges, des images, tout ce qu'il leur fallait. Dieu ne répondait pas, bien entendu, et c'était plutôt commode. Il y avait Dieu, et pour ceux qui aimaient les émotions fortes, le Diable. Est-ce qu'ils en avaient peur seulement ? Je regarde les diables de Saint-Jacques l'Entourloupé. Avec leurs oreilles d'ours et leurs queues de singe, ils seraient plutôt marrants. En tout cas, moins terribles que ce type qui est fait tout comme moi, pas plus moche, la voix flasque, la vêture pauvre, des taches au veston, du sommeil dans les mâchoires, son casse-croûte à côté de lui (parmi des bouts de crayon, des tampons, des règles, des encriers secs, une boîte pleine de mégots, une petite éponge où il humecte les timbres qu'il colle sur des carrés de papier gris, roses, verts, bleus).

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