Fatwa by Trevane Jacky

Fatwa by Trevane Jacky

Auteur:Trevane, Jacky [Trevane, Jacky]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Témoignage
Éditeur: L'Archipel (Éditions)
Publié: 2007-09-29T00:00:00+00:00


20

Derrière des portes fermées

Samir nous a très bien reçus. Il s’est montré très poli avec moi. Il s’est bien entendu avec Omar, bien qu’ils aient des caractères fort différents. Samir était très grand et costaud, avec d’épais cheveux noirs et une moustache. Il avait des yeux sombres, perçants, et la peau très mate. À côté, celle d’Omar, piquetée de taches de rousseur, paraissait très claire. Bien que les deux hommes aient tous les deux des cheveux de la même longueur et coiffés de façon identique, ceux d’Omar étaient bruns, presque auburn, et s’accordaient bien à la couleur de ses yeux. Samir avait une apparence qui intimidait alors qu’Omar semblait amical et facile à approcher. Le plus difficile était de se dire que tous les deux avaient le même âge, vingt-quatre ans, car on aurait facilement donné dix ans de plus à Samir.

Très vite, ils ont établi un protocole pour étudier ensemble, ce qui nous a permis, à Karen et à moi, de prendre un peu soin de nous. Samir et Karen disposaient de tout l’appartement pour eux deux. Situé au rez-de-chaussée, il comprenait trois grandes chambres et deux salons. Les parents de Samir étaient morts et ses deux sœurs avaient quitté la maison quand elles s’étaient mariées. Il y avait peu de meubles, à l’exception d’une immense commode très travaillée dans l’un des salons, et d’une gigantesque coiffeuse dotée d’un immense miroir au cadre de bois sculpté dans la chambre principale. La cuisine grouillait de cafards. Le tuyau d’évacuation était cassé et les odeurs des déjections de tout l’immeuble remontaient en permanence par le trou pour finir dans la cuisine de Karen. L’odeur pestilentielle n’invitait guère à préparer à manger.

— C’est dégueulasse. Il faut un mouchoir sur le nez pour mettre un pied dans la pièce, ai-je dit à Karen quand elle m’a fait visiter l’appartement. Quand va-t-on réparer ça ?

— Dieu seul le sait, a-t-elle répondu en soupirant. Deux types sont venus, la semaine dernière, mais ils sont repartis aussitôt. Tout ce qu’ils ont dit à Samir, c’est bokra.

J’ai ri.

— S’il y a un pays où l’on apprend la patience, c’est bien celui-ci. Tout est toujours bokra. Demain ne fait apparemment pas partie du vocabulaire.

Toute la semaine suivante, Omar a fait des allers et retours afin de rapporter nos effets de chez ses parents. Situés dans le même quartier du Caire, les deux appartements n’étaient distants que de quelques rues. Il aurait été facile pour la famille d’Omar de venir nous rendre visite, mais aucun d’eux ne l’a jamais fait.

Au cours de la première semaine de vie commune, je me suis rendu compte que Karen vivait dans la terreur de Samir. C’était une fille calme, gentille, naturelle, qui parlait toujours à voix basse, alors qu’il lui criait toujours dessus et lui donnait des ordres. Quand ils étaient ensemble, elle s’affairait en permanence autour de lui, allant lui chercher ceci ou cela, le visage fermé et anxieux. J’ai demandé à Omar ce qu’il pensait de l’attitude de Samir envers Karen. Il a seulement haussé les épaules et m’a dit de ne pas me mêler de ça.



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.