Félidés by Akif Pirinçci

Auteur:Akif Pirinçci [Pirinçci, Akif]
La langue: fra
Format: epub
Publié: 2013-05-11T16:00:00+00:00

J'atterris avec perte et fracas dans un minuscule espace en forme de baquet ; on aurait dit l'intérieur, taillé à même la pierre, d'une coupole à bulbe. L'endroit était plongé dans l'obscurité, mais un soupirail, à main droite, laissait filtrer un peu de lumière et permettait de s'orienter tant bien que mal. Une nouvelle fois pris au piège, il ne me restait d'autre solution que de me réengager dans une exploration, bien qu'entre-temps ma soif d'aventures eût été plus que tempérée. Il ne faisait guère de doutes que j'allais sous peu tomber sur le tueur qui connaissait ce labyrinthe mieux que moi, ô combien ! Il me demanderait l'heure puis me dévorerait tout cru. Comme tout être doté d'intelligence et d'imagination, j'avais plus d'une fois envisagé, comme hypothèses, la manière dont je périrais et les visions les plus bizarres m'avaient alors assailli. J'avais cependant oublié que l'accord final de toute existence intervient toujours dans un état de grande misère, pour ne pas dire d'inexorable détresse. C'était donc ainsi que Francis, le célèbre Monsieur-Je-sais-tout, allait exhaler son dernier soupir : enseveli sous terre, dans un enfer sombre et froid, broyé par la gueule puante d'un bâtard de Persan, alias le Dandin ! Beaucoup me regretteraient, très certainement. Gustav le premier, qui pleurerait toutes les larmes de son corps après mon soudain départ ou, comme on le voudra, ma soudaine disparition. Son chagrin serait tel qu'il garderait le lit pendant des semaines. Mais cette douleur-là diminuerait elle aussi peu à peu, les blessures du souvenir se refermeraient. Et, qui sait, peut-être que, deux ou trois mois plus tard, un autre utiliserait déjà mon assiette, se ferait gratter derrière les oreilles par mon « meilleur ami », avec de délicieux pets de plaisir. Qu'avait dit ce vénérable zombie de Deep Purple dans mon rêve d'une macabre beauté ? Ah oui : ainsi va la vie, ainsi va le monde !

Qu'étais-je en train de faire, imbécile que j'étais, j'étais en train de faire ce que jamais je n'avais encore fait : me résigner ! Je ne parvenais pas à déterminer si c'était l'effet de la peur, de l'épuisement ou bien d'un début de sénilité. Il était toutefois difficile de se cacher que l'implacable succession d'événements affreux que je venais de vivre commençait à faire de moi un autre homme. Il me fallait l'admettre, que cela me plût ou non. Un seul remède à cette maladie rampante : garder la tête haute ! Se ressaisir ! Montrer du courage !

Le cœur battant, je franchis le soupirail et je sautai de là dans un corridor obscur qui semblait confirmer mon hypothèse quant à l'endroit de mon dernier repos. Je me trouvais de toute évidence dans un système souterrain de sépulture, dans ce qu'on appelle des catacombes. A franchement parler, mon ahurissement garda des proportions modestes, bien que la seule chose que j'eusse en commun, sur le plan intellectuel, avec Gustav, fût l'archéologie. Combien de fois n'étais-je pas resté assis des journées entières, grisé, plongé dans ses

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