Eloge De L'Apostat : Essai Sur La Vita Nova by Jean-Pierre Martin

Eloge De L'Apostat : Essai Sur La Vita Nova by Jean-Pierre Martin

Auteur:Jean-Pierre Martin [Martin, Jean-Pierre]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Littérature Française
ISBN: 2021012573
Éditeur: La Gang©
Publié: 2020-12-31T23:00:00+00:00


Que reste-t-il après de tels retournements ? Que peut-il y avoir de commun à ces expériences ? Que nous disent-elles, au-delà de la diversité des réponses proprement littéraires, dans des écrits intimes, des récits d’expérience, des œuvres de fiction ou des essais ?

Qu’il faut accorder toute sa valeur à la question sans réponse du moment où l’on se ravise – à ce trou noir, ce vertige, ce basculement, cet instant où le vieux préjugé s’évide, où la certitude d’antan s’effondre, où une pensée impensable jusqu’alors se fait jour.

Qu’il ne faut pas tourner le dos à un désespoir qui n’est pas le contraire de l’espoir. Claude Roy : « Je découvris lentement la force de cette attitude-là. Ce n’était pas le doute qu’il me fallait apprendre, ni la méfiance, ni le scepticisme. C’était, plus difficile et plus tonique, ce non-espoir qui est la seule façon de garder un espoir9. »

Qu’il est salutaire et urgent de partir à la recherche d’une pensée qui ne soit pas sous tutelle, une pensée qui surmonte la peur du manque, du désordre, de l’ennui, du chaos, une pensée qui a déserté la culpabilité et la méfiance de soi. En un mot, une pensée qui ne soit plus épigonale.

Enfin, surtout peut-être, qu’il est nécessaire de repenser l’individu, ses prérogatives, son fragile pouvoir, son autonomie partout contestée, son irréductible quant-à-soi – et de ne plus se livrer pieds et poings liés à la passion du collectif, au groupe en fusion, à la « communion des saints ».

Merleau-Ponty, après son retournement, est condamné (c’est le point de vue de Sartre) à la vie solitaire, à la rumination intérieure, au retour sur soi ? Et alors ? N’est-ce pas préférable à la dévotion au stalinisme ? Roger Vailland, « après avoir été catholique, intellectuel petit-bourgeois, communiste, etc10 », en appelle à la condition de soi-même acceptée et voulue : l’universel concret pour soi, le seul réel pour soi, ce qu’il nomme la « souveraineté ». « La “condition humaine”, dit-il, est une abstraction », il ne se sent plus, on l’a vu, « obligé par l’Histoire », mais en contrepartie il se retrouve pleinement individu. Duras, elle qui avait reproché au marxisme de « s’arrêter » à la « vie intérieure », a appris, comme Vailland (ils ont d’ailleurs dû, tous deux, se retrouver chez elle, avec bien d’autres futurs exclus, comme Edgar Morin, Semprun et Claude Roy, au 5, rue Saint-Benoît, ce lieu du communisme dissident et de l’apostasie contagieuse), combien est pernicieux le besoin en soi de discipline, l’appel du groupe, la crainte du vide, la liaison entre peur et pouvoir. « L’individu ne peut s’en sortir que par lui-même, écrit-elle désormais, en retrouvant une indifférence totale à l’égard de ce qui se propose, affaires politiques, affaires commerciales11. » Son ami des années communistes, Edgar Morin, notait de son côté, à propos de sa rupture : « J’avais trop ignoré, jusqu’alors, les individus comme diastases. Je pensais maintenant que je devais faire mon travail de ferment monocellulaire12. » Se penchant sur son passé, Sollers reconnaît lui-même : « Le Sujet, tel était l’ennemi.



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