De Munich à Vichy by Lacroix-Riz Annie

De Munich à Vichy by Lacroix-Riz Annie

Auteur:Lacroix-Riz, Annie [Lacroix-Riz, Annie]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Essai, France, Histoire, 2nde Guerre Mondiale
Éditeur: Blondie - La Gang
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00


La guerre sociale et ses auxiliaires

Comme les précédents assauts anti-ouvriers, celui de 1939-1940 fut lancé par les grands patrons que fascinait l’ordre allemand et qui après le 23 août 1939 disposèrent librement des rouges. Le 5 octobre, Louis Férasson, tuteur de Daladier et héraut de la « politique ouvrière » nazie à appliquer en France, « se réjouit bruyamment de l’arrestation des communistes »1386. Lehideux renforça avec Bussière et Langeron des relations que leur répression commune de la grève de novembre 1938 avait renforcées. Grand ordonnateur de la lutte des classes aux usines Renault, qu’il avait épurées après novembre 1938, il n’avait jamais relâché l’effort. En 1939-1940, il entretenait avec Bussière contre les rouges des rapports intenses, directs ou délégués : il lui « adress[ait] personnellement […des] renseignements » et chargeait son collaborateur Henri Champommier de tenir « au courant, en [son] nom, d’affaires particulièrement intéressantes » le chef de la Sûreté générale. Bussière s’en « occup[ait] immédiatement », en compagnie du colonel Jeanbrault1387.

À l’image de Lehideux, le patronat, ruinant la thèse de la vengeance définitivement assouvie en novembre 19381388, stimulait sans trêve l’État qu’il accusait encore de « mollesse » en mai 1940 malgré son application à chasser des usines le moindre « meneur ». Le hiatus entre la terreur affichée d’une poussée de subversion ou de défaitisme saboteur de la production de guerre et la réalité décrite par les archives policières a frappé Talbot Imlay. Mais ce dernier a imputé cette bizarrerie aux fantasmes de 36 d’une CGPF traumatisée, insensible aux démentis formels, aussi hantée que son porte-parole Raoul Dautry par « les noyaux révolutionnaires » via lesquels « le Komintern avait créé un “centre international de sabotage” »1389. Bien que nul ne redoutât « le complot communiste »1390 – Bonnet et Daladier en riaient devant leurs interlocuteurs de l’Axe –, toutes les autorités civiles et militaires conjuguèrent leurs efforts.

« La plus longue des républiques », créatrice du « carnet B », n’avait certes pas attendu l’agonie pour enserrer la classe ouvrière dans le maillage policier, mais les modalités de la répression des anciens « meneurs » de 1936-1938 surprennent. D’une part, par la qualité des protagonistes étatiques sollicités par le grand patronat, les directions d’entreprise ou les notables locaux. Daladier, coiffé d’une double casquette (président du Conseil et ministre de la Guerre), s’impliqua dans la chasse aux militants ouvriers autant que dans ses décrets-lois. À ses côtés s’affairaient les ministres intéressés à la répression – tous, celui de l’Instruction publique inclus, délégué à la chasse aux enseignants1391 –, Intérieur et Armement en tête, le Deuxième Bureau, Héring, les chefs de la police (directeur de la Sûreté générale, préfet de police, etc.) et les préfets. D’autre part, par les résultats, tant de court terme (le bilan des arrestations) que d’avenir : les listes dressées ou complétées sous la dictature de Daladier (deux ans) et de Reynaud (deux mois) par la police, l’armée, les directions d’entreprises, les autorités locales, etc., qui circulaient sans répit entre ces instances, dispensèrent Vichy et l’occupant de s’atteler à cette mission.



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