De l'autre côté de la nuit by Mel Andoryss

Auteur:Mel Andoryss
La langue: fra
Format: epub
Tags: Jeunesse
Éditeur: Castelmore

11

NORTH ET MAX

À AGUARIAN, LE BRUIT DES MOTEURS carburant à plein régime couvrait les rumeurs de l’océan de cauchemars. Dans les multiples citernes de la tortue mécanique, on faisait encore le plein d’énergie liquide, quand bien même la nuit était tombée depuis longtemps. C’était l’avantage de travailler avec une armée de robots : pas besoin de pauses. Et c’était également une chance, car il fallait à North bien plus de temps pour raffiner l’énergie tirée des cauchemars qu’il n’en fallait à Max pour synthétiser celle qu’il tirait des nuages de rêves. Il valait mieux que les extracteurs tournent en permanence, sans quoi la jeune fille aurait eu du mal à tenir la concurrence. Cependant, ce n’était pas le rendement de son usine qui la préoccupait à une heure aussi tardive.

Les sourcils froncés et la chemise débraillée, fait inhabituel chez une personne d’ordinaire si soigneuse et irréprochable, North traversait la zone de stockage d’un pas énergique, affichant une expression qui n’augurait rien de bon. Son robot s’accrochait fermement à son épaule, tout en équilibre précaire et diodes clignotantes. Le Vendeur de Nuit n’était pas là pour plaisanter.

North quitta la plate-forme qui menait au cœur de l’usine et se laissa glisser le long de la rambarde métallique, survolant les escaliers. Elle atterrit souplement dans le couloir qui menait au centre de commande et s’y engagea sans ralentir. Là plus qu’ailleurs, l’aménagement d’Aguarian témoignait du bon goût de sa propriétaire.

Les murs étaient tapissés de tissu bleu roi à l’aspect noble, et ornés de cadres ouvragés évoquant la Belle Époque et les balbutiements de l’ère industrielle sur Terre. North avait toujours eu beaucoup d’intérêt pour les œuvres de l’artiste Mucha et de l’écrivain Jules Verne. Elle les avait découvertes à Evernight et avait affiché des références et des hommages aux deux hommes partout dans son antre. En temps normal, elle aimait passer lentement ses quartiers en revue, juste pour admirer les arabesques et les lignes élégantes sur les tableaux aux couleurs pâles. Les lampes de cuivre éclairaient d’une lumière douce son musée personnel, qui affichait toujours la même exposition. Tout au bout du couloir se trouvait son bureau, où elle passait le plus clair de son temps. Elle avait même caressé l’idée d’y installer son lit, fut un temps.

North poussa la lourde porte de métal et entra dans le centre névralgique d’Aguarian. L’éclairage artificiel accentua la pâleur de sa peau.

— Dis-moi que c’est une blague ! lança-t-elle sans préambule au robot qui attendait là, immobile et attentif.

Il tenait entre ses mains articulées un papier d’une longueur interminable, qui se répandait en ondulations souples sur le sol.

— C’est une blague, répéta-t-il, docile, sans même lever la tête de sa lecture.

North eut un sourire sans joie qui dévoila ses longues canines et soupira avant de rejoindre son fauteuil. Elle s’y assit avec une brusquerie inhabituelle et se passa la main sur le front. Puis, après quelques instants de silence, elle se tourna de nouveau vers le robot, qui n’avait pas bougé d’un rouage.

— Quelle certitude, pour

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