de la Rome Antique by Dictionnaire

de la Rome Antique by Dictionnaire

Auteur:Dictionnaire [Dictionnaire]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 9782259216388
Éditeur: Plon
Publié: 2010-12-31T23:00:00+00:00


Mais voyez comment en témoignait Tite-Live (Histoire de Rome, 26) longtemps plus tard : « [Cela] jeta dans Rome une grande terreur. L’affluence des habitants de la campagne, dont les récits ajoutaient le mensonge à la vérité, avait répandu l’agitation dans toute la ville. C’était peu dire que les femmes firent retentir de leurs gémissements les maisons particulières ; les dames de distinction, bravant tous les regards, couraient en foule vers les temples des dieux ; les cheveux épars, agenouillées au pied des autels, les mains tendues vers le ciel et vers les dieux, elles les suppliaient d’arracher Rome aux mains des ennemis. »

Bref, Hannibal est bien l’ogre-calamité de Rome. Et quand Cicéron veut abattre Antoine, il le traite de « nouvel Hannibal », injure suprême dont Antoine se souviendra, quand il fera percer la langue de Cicéron – plus exactement, de sa tête coupée et exposée sur la tribune aux Rostres. Il est vrai qu’Hannibal faillit vraiment l’emporter : il est donc inévitable que les historiens, Tite-Live en tête, aient exagéré la puissance ou le talent d’un ennemi si périlleux, dont l’énormité seule pouvait justifier qu’il ait fait trembler la capitale du monde. On érigea même à Rome des statues du général carthaginois, comme symbole d’une force imbattable et pourtant vaincue, grâce aux dieux. On prétendait que son audace lui avait été suggérée par un songe trompeur. Écoutons encore Tite-Live : « Selon la tradition, il vit en rêve un jeune homme d’apparence divine, qui se disait envoyé par Jupiter pour conduire Hannibal en Italie : il suffisait de le suivre et de ne pas le quitter des yeux. Effrayé, Hannibal le suivit d’abord sans regarder autour de lui et sans se retourner ; puis, poussé par une curiosité bien naturelle, il voulut savoir ce qu’on lui interdisait de regarder derrière lui et ne put s’empêcher de se retourner ; il vit alors un énorme dragon qui faisait un affreux massacre d’arbres et de branches ; et derrière lui éclatait un orage, avec des coups de tonnerre. Quand il demanda ce que signifiaient cet animal monstrueux et ce présage, on lui répondit que c’était le désastre d’Italie. Qu’il poursuive donc sa route sans se poser d’autres questions et qu’il respecte les secrets de la destinée. » Sauf que le désastre d’Italie ne serait pas celui de l’Italie, mais le sien, celui d’Hannibal en Italie. Ce qu’il ne comprit pas.

De toute manière, nous sommes bien obligés de nous en tenir à ce que nous ont légué les annales romaines, qui en tracent un portrait terrible. L’adjectif qui revient toujours est crudelis, « cruel ». Ce serait un chef brutal, sans éthique et sans règles. Un sauvage pugnace. C’est évidemment faux. Il respectait ses adversaires, s’entretint avec Scipion l’Africain de façon fort urbaine, et il ne se reconnaissait qu’un supérieur en stratégie militaire : Alexandre le Grand. Toute la phraséologie dépréciative latine réussit à imprimer l’inconscient collectif romain, mais elle servait à masquer l’autre réalité : Hannibal fut un stratège hors pair et un génie des batailles.



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