Choléra Haïti 2010-2018, histoire d'un désastre by Renaud Piarroux

Auteur:Renaud Piarroux [Piarroux, Renaud]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Histoire, Sciences humaines, Politique
ISBN: 9782271125248
Éditeur: CNRS éditions
Publié: 2019-07-14T22:00:00+00:00

Mai 2013, une nouvelle saison des pluies commence. Bien qu’avec Stan nous ayons une idée assez précise de ce qu’il faut faire, rien n’est encore mis en œuvre à l’échelle nationale pour lutter contre la transmission et contrecarrer la résignation générale. Stan s’emploie à remobiliser en présentant les résultats de ses investigations. Il débute par les hauts cadres du ministère de la Santé, où le docteur Donald François – coordonnateur national de la lutte contre le choléra – et l’épidémiologiste en chef de l’OPS accueillent ses résultats sur la défensive, y voyant une mise en cause implicite de leur manque de combativité. Il est vrai que Stan, dans sa fougue, dresse un inventaire peu diplomatique des dysfonctionnements constatés dans la chaîne de surveillance et de lutte. Donald François se donne comme priorité numéro un d’éviter les morts. Les chiffres lui donnent raison puisque la létalité est légèrement inférieure à 1 %, valeur seuil en dessous de laquelle l’OMS considère que la prise en charge des patients est correcte. Pourquoi alors remettre en cause sa stratégie ? C’est cependant l’épidémiologiste de l’OPS qui s’oppose le plus fermement à Stan. Il est convaincu, que dis-je, il sait, que le choléra est enraciné dans l’environnement haïtien. Déployer des dizaines d’équipes sur le terrain pendant les périodes de calme ne serait qu’une perte de temps et d’énergie. Stan ferait mieux de retourner étudier la bibliographie sur le choléra au lieu de proposer une stratégie irréaliste qui ne fera que gâcher les rares moyens disponibles. Il y découvrirait l’existence du paradigme environnemental. Stan se défend. Il connaît très bien son sujet et ses interlocuteurs n’ont rien à lui apprendre sur la théorie environnementale. Il l’a étudiée et en a identifié les failles. Il ne le sait pas encore, mais ses réponses ont fait mouche, même s’il est loin d’emporter l’adhésion de tout son auditoire.

La réunion terminée, un homme, resté particulièrement discret pendant toute la discussion, l’aborde. Il s’appelle Édouard Beigbeder et c’est le représentant de l’Unicef en Haïti. Le projet de Stanislas l’intéresse : Olivier Thonet, sitôt ses congés terminés, lui a rendu compte de leur périple dans le nord du pays. Stan est convié à venir en rediscuter l’après-midi même, puis à présenter le même exposé deux jours plus tard lors d’une importante réunion rassemblant les acteurs humanitaires – agences onusiennes, principaux bailleurs, ONG… Là encore, il ne se fera pas que des amis. Malgré tout, l’idée de relancer la lutte contre la transmission du choléra gagne du terrain.

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