Ce qu’il nous faut, c’est un mort by Hervé Commère

Ce qu’il nous faut, c’est un mort by Hervé Commère

Auteur:Hervé Commère [Commere, Herve]
La langue: fra
Format: epub
Tags: 2016-03-10T10:32:24.822000-04:00 JF
Éditeur: 12-21
Publié: 2016-03-08T23:00:00+00:00


Do est tendu et fait tout son possible pour le dissimuler tandis qu’il sert, mais ça ne passe pas. À mesure que les heures s’écoulent, le patron du bar sent une menace se resserrer sur lui. Dès l’ouverture, dès le premier client. Un habitué, un café sans sucre tous les matins à heure fixe, et la journée commence. Là, l’homme est entré mais n’a rien dit, rien commandé. Il s’est planté face à lui :

— Maxime est mort.

Do a marqué son étonnement, s’est appuyé sur le comptoir en demandant comment, où, pourquoi, et son client a répété plusieurs fois le peu qu’il savait de l’accident. Depuis, ça ne parle que de Maxime ou presque au Café de la Place. À chaque fois qu’il entend ce prénom, Do se crispe davantage. Chacun y va de son commentaire, chacun soupçonne on ne sait qui, fustige la fatigue et la vie, et prend en grippe la terre entière. On parle de suicide, on parle d’accident, on parle aussi d’assassinat, on dit tout et son contraire et personne ne sait rien. Il voudrait les faire taire, leur intimer l’ordre de fermer leur gueule mais, bien sûr, ne peut pas. Il dévisage tous les clients, essaye de rester discret, il regarde les passants, se méfie du village entier. Il voudrait se répéter que Maxime s’est endormi au volant, que c’est un accident bien triste, il voudrait s’en convaincre. Mais il sait que quelqu’un est là pas loin, qui l’observe et le connaît. Tout à l’heure, un gamin est entré dans le café et lui a tendu une grande enveloppe. Do lui a demandé ce que c’était, le gamin lui a dit qu’il n’en savait rien, un type derrière l’église lui avait glissé un billet dans la main pour qu’il apporte ça ici. Le petit n’avait jamais vu cet homme avant, qui l’a regardé pédaler jusque-là. Puis le gamin est reparti, son billet plié tout au fond de son short. Do a décacheté l’enveloppe. À l’intérieur, il y avait une photo, qu’il a sortie doucement et laissée tomber au sol comme s’il s’était brûlé les doigts. C’est pris de derrière la vitre, on a grimpé le long de la gouttière. On reconnaît ses meubles. Le canapé, l’étagère, cela se passe dans son salon. Quinze Vrainvillaises au moins pourraient en témoigner. C’est bien ici, dans son appartement, et c’est bien lui, debout et torse nu, son profil de charmeur. Il serre dans ses bras une femme que tous les villageois connaissent. Aucun cependant ne l’a jamais vue si souriante, ou bien c’était il y a longtemps. Elle a ses yeux de louve et ses bras dessinés, ses épaules anguleuses. Mais contre lui, elle semble soudain légère. Elle est heureuse. Marie Damrémont a les mains sur sa peau, et semble prête à s’envoler.



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