Cécile est morte by Simenon Georges

Cécile est morte by Simenon Georges

Auteur:Simenon,Georges [Simenon,Georges]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782070399574
Éditeur: Alexandriz
Publié: 1941-02-17T23:00:00+00:00


3

Maigret avait chaud. Il avait bon chaud, comme il disait quand il était enfant, et si les lampes s’étaient soudain allumées, il aurait pu passer, engoncé dans son pardessus, les mains dans les poches, le corps un peu renversé en arrière et les yeux mi-clos, pour l’incarnation de la béatitude.

En réalité, c’était un truc, une petite tricherie qu’il employait vis-à-vis de lui-même quand il en avait assez de penser à un seul sujet et qu’il sentait son esprit sur le point de tourner à vide. L’été, il se serait assis à la terrasse d’un café, au soleil, et, les paupières à demi baissées, il se serait laissé mijoter ainsi devant un demi.

Quand on avait installé le chauffage central quai des Orfèvres et que le commissaire avait demandé et obtenu de conserver son vieux poêle à charbon, de jeunes inspecteurs avaient haussé les épaules. Eh bien ! c’était toujours le fameux truc… Quand ça n’allait pas, quand, à force de se pencher sur un problème, celui-ci se vidait de toute substance et n’apparaissait plus que comme un tissu de froides incohérences, Maigret chargeait son poêle jusqu’à la gueule, se chauffait tantôt côté face, tantôt côté pile, tisonnait, ouvrait la clef toute grande et, petit à petit, sa chair se dilatait de bien-être, ses paupières picotaient, les objets, autour de lui, s’estompaient, non sans que la fumée de son éternelle pipe y fût pour quelque chose.

Dans cet état d’engourdissement physique, l’esprit, comme dans les rêves, saisissait des rapports parfois saugrenus, suivait des chemins que la pure raison n’aurait pas découverts…

Mme Maigret n’avait jamais compris. Quand elle lui touchait le bras, à la fin d’une soirée au cinéma, elle ne manquait pas de soupirer :

— Tu as encore dormi, Maigret… Je me demande pourquoi tu paies douze francs un fauteuil, alors que tu as un si bon lit…

La salle était noire, chaude de chaleur humaine, vivante de la vie de centaines de personnes assises les unes à côté des autres et qui pourtant s’ignoraient. Au-dessus des têtes, le long triangle de lumière blafarde qui partait de la cabine de projection et qui attirait la fumée de tabac.

Si on lui avait demandé ce qu’on jouait… Cela n’avait aucune importance… Il regardait les images, sans essayer d’établir un rapport entre elles… Puis son regard s’abaissait, parce qu’il percevait un léger mouvement près de lui…

Cet homme puissant, qui depuis bientôt trente ans brassait en quelque sorte des passions poussées au paroxysme, c’est-à-dire jusqu’au crime, était un chaste, et il toussa, choqué par l’attitude de sa voisine et de son compagnon dont il ne voyait que la main laiteuse dans le clair-obscur. Tout à l’heure, pourtant, quand il s’était assis sur son manteau, la demoiselle lui avait paru jeunette. Elle ne bougeait pas. Son visage, blanchâtre comme la main d’homme, comme le morceau de cuisse que celui-ci découvrait, restait tourné vers l’écran…

— Hum !… Hum !… fit encore le commissaire, mal à l’aise.

Les amoureux n’en avaient cure. Elle devait avoir le même âge que Nouchi…

Au fait, quand



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