Berlin Alexanderplatz by Alfred Döblin

Berlin Alexanderplatz by Alfred Döblin

Auteur:Alfred Döblin [Döblin, Alfred]
La langue: fra
Format: epub
Tags: roman
Éditeur: Gallimard
Publié: 1929-01-14T23:00:00+00:00


TROISIÈME PRISE DE BERLIN

Et revoici Franz Biberkopf pour la troisième fois dans Berlin. La première fois les toits allaient glisser, les Juifs arrivèrent, il fut sauvé. La deuxième fois Lüders le trompa, il picola comme un trou. Maintenant, la troisième fois, il a perdu un bras, mais il s’enfonce hardi dans la ville. L’homme a du courage, redouble, quadruple de courage.

Herbert et Eva lui ont laissé un joli pactole, le patron du bistrot d’en bas veille dessus. Mais Franz ne prend que quelques pfennigs, et il décide : Je vais pas toucher à c’t argent-là, faut que je soye indépendant. Il passe à l’Assistance et Secours et réclame un soutien. « Faut d’abord qu’on fasse des recherches. — Et qu’est-ce que je fais en attendant ? — Revenez dans quelques jours. — Dans quelques jours j’serai p’t-être crevé de faim. — On crève pas si vite de faim à Berlin, disent tous la même chose. Et puis on ne vous donnera pas d’argent, juste des bons, et on paie directement le terme, et le logement c’est bien ça ? »

Alors Franz redescend du bureau d’aide sociale, et comme il est en bas, ses yeux se dessillent : rechercher, comment ça rechercher, p’t-être qu’y vont faire aussi des recherches sur mon bras et comment que ça s’est passé. Il est planté devant un tabac et il gamberge : ils vont demander ce qui est arrivé à mon bras, qui a payé et où que je logeais. C’est bien possible. Et puis, de quoi j’ai vécu ces derniers mois. ’Tends voir.

Il gamberge et se remet en train : que faire ? Qui interroger maintenant, comment faire maintenant, et j’vais pas non plus vivre de leur argent, aux deux.

Alors deux jours durant il va et vient entre l’Alex et la Rosenthaler Platz pour retrouver Meck, voilà quelqu’un à qui parler ; et aussi bien le deuxième soir il le croise sur la Rosenthaler Platz. Ils se regardent. Franz veut lui serrer la main — comme ils se sont salués autrefois après l’histoire avec Lüders, la joie, et maintenant —, Meck lui tend une main hésitante, n’appuie pas. Franz veut lui serrer de nouveau la pince avec la main gauche, mais le petit Meck fait un visage si sérieux ; qu’est-ce qu’il a le gaillard, je lui ai fait quéque chose ? Et ils remontent la Münzstrasse et marchent et marchent encore, repassent dans la Rosenthaler Strasse et Franz attend toujours que Meck l’interroge sur son bras. Mais il ne l’interroge même pas là-dessus, son regard est toujours fuyant. P’t-être que je suis trop pouilleux pour lui. Alors Franz y va d’un ton badin et demande des nouvelles de Cilly, ce qu’elle fait.

Ah, ê va bien, pourquoi qu’elle irait mal aussi, et Meck raconte sur elle en long et en large. Franz se force à rire. Et l’autre qui ne lui demande toujours pas pour son bras, et là tout à coup une lueur dans Franz, et il demande : « Tu fréquentes p’t-être toujours au bistrot de la Prenzlauer ? » Meck, dédaigneux : « Oui, parfois.



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