Belle comme la nuit by Joanna Bourne

Belle comme la nuit by Joanna Bourne

Auteur:Joanna Bourne [BOURNE, Joanna]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: J'ai Lu
Publié: 2019-10-25T09:55:47+00:00


1. En français dans le texte. (N.d.T.)

22

William Doyle était assis à une table du Crocodile, près de Covent Garden, et réfléchissait tout en jouant avec sa pipe. Dehors, la journée était belle et douce. Les oiseaux chantaient ; calèches et cabriolets à la mode emmenaient la bonne société au parc. Quel soulagement, après ce froid. Métaphoriquement parlant, il avait envoyé plusieurs furets dans divers terriers, à la recherche d’informations sur O’Grady et Deverney, et de rumeurs à propos de Wellington.

Il commençait à y voir plus clair. O’Grady avait une femme dans le quartier de Seven Dials. Il louait une chambre dans Lemon Street, à Whitechapel. Ancien sergent de l’armée, il avait un tempérament explosif et un penchant pour l’alcool. Il avait participé à la guerre en Espagne, depuis la bataille de Roliça jusqu’à celle de Fuentes de Oñoro, après laquelle il avait été dégradé.

Sur Deverney, il n’avait rien appris. Cet homme était apparemment l’individu le plus inoffensif qui soit. Devant ce nom, la plupart de ses informateurs réguliers n’avaient pu faire autrement que hausser les épaules.

Mais son petit doigt lui soufflait que Deverney était encore plus dangereux qu’O’Grady. Même si, pour l’instant, aucun lien ne pouvait être établi entre eux.

Doyle tassa le tabac dans le fourneau en terre de sa pipe, prenant bien son temps. Bourrer sa pipe, la gratter, la curer était pour lui autant d’activités propices à la réflexion, sans compter que cela lui occupait les mains et répandait une authentique odeur d’ouvrier autour de lui. Il finissait par l’allumer, de temps à autre, même si ce n’était pas absolument nécessaire.

Quatre ouvriers, qu’il connaissait de vue pour les avoir souvent croisés ici, quittèrent la taverne ensemble. Une vendeuse des quatre-saisons à l’air enjoué, le visage couperosé, les hanches larges, vint s’installer sur un banc.

Le Crocodile était un lieu de rendez-vous très pratique. La lie de l’humanité y côtoyait des citoyens plus ou moins respectables. Avec le temps, bière renversée, couteaux plantés sous le coup de la colère et pipes en terre vidées sur les tables en chêne que l’on ne nettoyait jamais vraiment avaient conféré à l’endroit une patine bien particulière. L’odeur de fumée froide imprégnait les murs passés à la chaux, la boue des rues calait les lattes du plancher. Une crasse épaisse et collante tapissait l’intérieur des vitres, laissant filtrer la lumière du jour avec parcimonie, maintenant tout le monde dans la pénombre et l’anonymat.

La porte s’ouvrit, et un gamin entra, hésitant. Il resta un instant planté là, plissant les yeux, et tous les clients du Crocodile purent l’observer à loisir tandis qu’il s’habituait à la pénombre. On pouvait en déduire qu’il n’avait aucune mauvaise intention et voir là un jeune homme innocent. Ou stupide.

Un coursier, probablement. Le gamin repéra enfin son objectif et fonça droit sur lui, en évitant les tables sur son chemin.

Il s’arrêta devant Doyle, raide, les yeux baissés. Un physique plutôt ingrat. Petit, maigre, le visage étroit, le teint pâle, mal fagoté. « Fragile » était le mot qui venait à l’esprit en le regardant.



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