Argent, L' by Un livre Un film

Argent, L' by Un livre Un film

Auteur:Un livre Un film [film, Un livre Un]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman
Éditeur: Ebooks libres et gratuits
Publié: 2010-06-20T04:00:00+00:00


VIII

Ce fut le 1er avril que l’Exposition universelle de 1867 ouvrit, au milieu de fêtes, avec un éclat triomphal. La grande saison de l’empire commençait, cette saison de gala suprême, qui allait faire de Paris l’auberge du monde, une auberge pavoisée, pleine de musiques et de chants, où l’on mangeait, où l’on forniquait dans toutes les chambres. Jamais règne, à son apogée, n’avait convoqué les nations à une si colossale ripaille. Vers les Tuileries flamboyantes, dans une apothéose de féerie, le long défilé des empereurs, des rois et des princes, se mettait en marche, des quatre coins de la terre.

Et ce fut à la même époque, quinze jours plus tard, que Saccard inaugura l’hôtel monumental qu’il avait voulu, pour y loger royalement l’Universelle. Six mois venaient de suffire, on avait travaillé jour et nuit, sans perdre une heure, faisant ce miracle qui n’est possible qu’à Paris ; et la façade se dressait, fleurie d’ornements, tenant du temple et du café-concert, une façade dont le luxe étalé arrêtait le monde sur le trottoir. À l’intérieur, c’était une somptuosité, les millions des caisses ruisselant le long des murs. Un escalier d’honneur conduisait à la salle du conseil, rouge et or, d’une splendeur de salle d’opéra. Partout, des tapis, des tentures, des bureaux installés avec une richesse d’ameublement éclatante. Dans le sous-sol, où se trouvait le service des titres, des coffres-forts étaient scellés, immenses, ouvrant des gueules profondes de four, derrière les glaces sans tain des cloisons, qui permettaient au public de les voir, rangés comme les tonneaux des contes, où dorment les trésors incalculables des fées. Et les peuples avec leurs rois, en marche vers l’Exposition, pouvaient venir et défiler là : c’était prêt, l’hôtel neuf les attendait, pour les aveugler, les prendre un à un à cet irrésistible piège de l’or, flambant au grand soleil.

Saccard trônait dans le cabinet le plus somptueusement installé, un meuble Louis XIV, à bois doré, recouvert de velours de Gênes. Le personnel venait d’être augmenté encore, il dépassait quatre cents employés ; et c’était maintenant à cette armée que Saccard commandait, avec un faste de tyran adoré et obéi, car il se montrait très large de gratifications. En réalité, malgré son simple titre de directeur, il régnait, au-dessus du président du conseil, au-dessus du conseil d’administration lui-même, qui ratifiait simplement ses ordres. Aussi Mme Caroline vivait-elle désormais dans une continuelle alerte, très occupée à connaître chacune de ses décisions, pour tâcher de se mettre en travers, s’il le fallait. Elle désapprouvait cette nouvelle installation, beaucoup trop magnifique, sans pouvoir cependant la blâmer en principe, ayant reconnu la nécessité d’un local plus vaste, aux beaux jours de tendre confiance, lorsqu’elle plaisantait son frère qui s’inquiétait. Sa crainte avouée, son argument, pour combattre tout ce luxe, était que la maison y perdait son caractère de probité décente, de haute gravité religieuse. Que penseraient les clients, habitués à la discrétion monacale, au demi-jour recueilli du rez-de-chaussée de la rue Saint-Lazare, lorsqu’ils entreraient dans ce palais de la rue de



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