Le creuset des âmes by Bruce Fergusson

Auteur:Bruce Fergusson [Fergusson, Bruce]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Fantasy
Publié: 1993-01-01T16:54:15+00:00

18

Prisonnier

Debout derrière la palissade, Falca observa les évideurs qui allumaient des torches aux quatre coins de la place. Au milieu, deux veulx vêtus de capes blanches discutaient près d’une estrade. De toute évidence, c’était sur cet autel que, dans moins d’une heure, les prisonniers seraient vidés de leur âme.

Falca cracha entre les pieux de la palissade et essaya de rassembler ses idées. Son aphte racleux, pourtant guéri depuis des semaines, l’agaçait de nouveau et il ne pouvait s’empêcher de le tâter du bout de la langue.

Il n’avait pas beaucoup de temps. Saphrax et ses comparses l’avaient jeté dans cette prison avant de disparaître dans les rues grises du port. Une centaine d’hommes l’entouraient, chacun se demandant probablement s’il serait choisi comme victime par les évideurs. Si ce sort devait lui échoir, il ne se soumettrait pas, décida Falca en son for intérieur. Masse ou pas masse, il s’arrangerait pour tuer deux ou trois de ces salopards avant qu’ils puissent mettre la main sur lui.

Promenant son regard par-dessus la palissade, il scruta le camp dressé près de la carrière : la prison des vidés. Malgré le jour déclinant, il apercevait nettement leurs bras, glissés entre les piquets, leurs visages hagards et inexpressifs.

Non. Ils ne l’auraient pas facilement. Le moment venu, Saphrax se faufilerait sans doute sur la place, afin d’assister à la cérémonie d’évidement. Alors, Falca s’arrangerait pour échapper aux gardacs et il le tuerait de ses propres mains, avant que les autres aient le temps d’utiliser leur masse. La masse d’Amala ne serait à Saphrax d’aucune protection.

Cependant, il n’était toujours pas résigné à mourir ici. Cette maudite palissade le rendait fou de rage. Il n’était quand même pas sorti des pontons de Draica pour finir dans cette misérable cage ! À côté de lui, un crâne-de-schiste se grattait le bras à l’aide d’un silex finement aiguisé. Exaspéré, Falca haussa les épaules. Il devait bien y avoir un moyen de sortir de là ! La nuit était sa meilleure alliée. Elle lui permettrait sans doute de s’enfuir jusqu’à la forêt. De là, il gagnerait l’un des villages abandonnés qu’il avait aperçus en venant. Il lui faudrait voler des provisions, trouver un bateau et mettre le cap vers le sud en espérant que Roak lui serait favorable.

Mais d’abord, il fallait sortir de cet ignoble enclos.

Une faible lueur bleutée baignait encore les tours du château de Grippa. Une grande activité régnait au pied des remparts. Soudain, alors qu’il fixait intensément les allées et venues des évideurs et des chasse-galères, Falca sentit un contact contre sa jambe. Il se retourna brusquement et découvrit un boiseux qui lui reniflait les pieds tout en marmonnant dans un langage incompréhensible. Avec une surprise mêlée d’impatience, il fit un geste de la main pour le chasser.

Apparemment, c’était une femelle. La bande d’étoffe rouge et crasseuse qui lui couvrait les épaules ne dissimulait pas ses seins pointus. Ses cheveux noirs étaient plus longs que ceux des femelles qu’il avait vues à Draica et elle ne portait qu’une seule petite botte de cuir.

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