La neige d'Istanbul by Mel Arrighi

La neige d'Istanbul by Mel Arrighi

Auteur:Mel Arrighi [Arrighi, Mel]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
ISBN: 9782070460984
Google: yyThHAAACAAJ
Éditeur: Gallimard - Série Noire
Publié: 1978-05-14T22:00:00+00:00


Troisième Partie

CHAPITRE XVII

Une manifestation avait lieu Piazza del Duomo. Des étudiants déferlaient par milliers, semblait-il, d’un côté de la place, devant la grande arcade de la Galeria, en brandissant des drapeaux portant le marteau et la faucille et des étendards rouges proclamant : « Lotta continua » – « Borghesia assassina. » Ils scandaient des slogans en accentuant les syllabes : le NOStre banDIERe, SEMpre e ORa.

Mike acheta une carte de Milan dans un kiosque, s’assit au bord du trottoir et la déplia. Gillian s’assit à côté de lui, serra ses genoux dans ses bras et regarda les manifestants qui passaient à quelques mètres d’eux. Mike étudia la carte pour trouver la Via Fiori Chiari. Instinctivement, il commença à se décharger de son sac à dos, puis se reprit. Les bretelles du sac alourdi par les dix briques de morphine lui entamaient les épaules. Mais il se sentait plus en sécurité quand il l’avait sur le dos.

— Ils ont l’air de si braves gosses ! dit Gillian.

— Et pourquoi ne seraient-ils pas de braves gosses ?

— Ce sont des Communistes, non ? On pourrait les croire plus dépenaillés.

Mike leva les yeux de la carte et regarda un instant les étudiants. Ils marchaient par groupes représentant chacun une organisation de gauche dont le nom était inscrit sur une banderole rouge. Devant chaque groupe, un jeune homme, véritable maître de chapelle, entonnait des chants sonores. Il y avait presque autant de filles que de garçons et tous portaient des tenues de prolétaires en coton bleu et vert olive délavé. Leur visage avait le teint clair des Italiens du nord, avec des traits vigoureux, réguliers. Certains portaient des livres de classe. Ces étudiants paraissaient de disposition plus aimable que leurs homologues américains, mais en même temps plus déterminés.

— Dans ce pays, le Communisme est respectable, dit Mike. C’est le seul parti efficace. Et la classe moyenne apprécie l’efficacité.

Il se replongea dans sa carte.

Au bout d’un instant, Gillian lui demanda :

— Tu as trouvé la rue ?

— Laisse-moi le temps de me reconnaître sur cette carte.

Il repéra la Piazza del Duomo où ils se trouvaient. Il comprit alors pourquoi le commerçant de Vérone avait fait un détour pour les y déposer. C’était le centre de la ville, tout partait de là. Le marchand était un homme joyeux qui ne connaissait pas un mot d’anglais et leur avait souhaité un cordial « buon viaggio » en les quittant. Le camionneur qui les avait embarqués près de Venise avait été tout aussi aimable. En réalité, l’auto-stop de Venise à Milan s’était révélé facile et agréable. Ils avaient atteint Milan en fin d’après-midi en deux étapes, après s’être arrêtés à Vérone. Là, Mike était allé acheter un grand sac à dos vert dans un magasin de sports. Puis il avait choisi un hôtel modeste dans une petite rue. Il était entré avec Gillian en demandant s’il pouvait louer une chambre pour une heure. Le portier qui semblait considérer avec sympathie les élans amoureux des jeunes hippies leur annonça à regret que ce n’était pas autorisé.



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