Chrysalide des villes by Frédéric H. Fajardie

Chrysalide des villes by Frédéric H. Fajardie

Auteur:Frédéric H. Fajardie [Fajardie, Frédéric H.]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Nouvelle(s), Policier, Roman noir, Littérature française
Éditeur: Manitoba
Publié: 1999-01-02T00:00:00+00:00


21 novembre 1997.

Sédition !

Il lui semblait que le monde bruissait bizarrement. Et qu’autour de lui, l’atmosphère s’était comme densifiée, si bien que sa chambre, sa propre chambre, lui parut soudain angoissante.

Il appuya sur l’interrupteur en forme de grosse olive de sa lampe de chevet et entendit, venue de nulle part, une petite voix contrariée qui murmurait :

– Te gêne pas, hein, fais comme chez toi !

Un peu angoissé, il regarda autour de lui : personne.

Il alluma une Camel d’un geste nerveux et entendit un hurlement, suivi d’une phrase dite sur un ton où perçait la colère :

-Mais il est cinglé, ce type, il met le feu à mon beau corps d’Américaine blonde !

« Je dors encore. Un mauvais rêve, sans doute », songea-t-il en prenant le parti de sourire.

Il décida de se donner le temps de réfléchir à tout cela et, d’un geste qui lui était familier, il donna une grande claque à l’oreiller et l’installa derrière ses reins.

Il entendit une voix bourrue :

– Pourquoi tu me cognes, espèce de brute ? Ah, je vois, c’est ce vieux réflexe dont parlait Karl Marx : même exploité à fond, un prolétaire, chez lui, trouve plus exploitable encore, sa femme ! Et faute de femme, c’est l’oreiller qui trinque. Voilà comme tu es, toi : dès le matin, il faut un bouc émissaire à tes échecs et non content d’avoir toute la nuit posé ta tête infecte sur mon petit bidon, tu m’allonges une méchante baffe... Fasciste, va !

L’homme secoua la tête en s’obligeant à sourire, un peu nerveusement, au reste. Tout cela lui semblait impossible, aussi lança-t-il :

– Quel cas curieux !

Tel un observateur extérieur nullement impliqué dans l’affaire, il feignait le commentaire objectif, distanciant ainsi ce qu’il vivait comme sujet. Exactement : notre malin tentait de mettre une distance entre lui et cette suite de phénomènes irrationnels qui le concernaient de très près !

Oh l’hypocrite !

Il se leva néanmoins avec une certaine hâte, tentant d’ignorer les chœurs des lattes de parquet puis le carrelage qui protestaient avec force.

Il saisit avec méfiance la brosse à dents qui lui jeta au visage :

– Ne me serre pas si fort avec tes gros doigts vulgaires, sale brute !

Puis il appuya sur le tube de dentifrice. Un gel bleu en sortit et se répandit sur les poils de la brosse en éructant :

– Tocard ! Pas assez fortuné pour t’acheter un bigorneau ou un bulot, tu t’offres à peu de frais un phénomène compensatoire en m’extrayant de ce tube où j’étais lové tel un gluant et froid poisson des profondeurs...

– C’est poétique, ça ! remarqua l’homme, heureux de s’offrir une diversion.

Puis, sentant que la pâte dentifrice allait rétorquer quelque insolence, il enfonça des boules Quies dans ses oreilles.

*

Une demi-heure s’était écoulée.

L’homme retrouvait une cohérence dans un monde de nouveau ordonné.

Dans la cuisine, il saisit une pomme, guettant une protestation : rien !

Il ôta ses boules Quies. Pas le moindre murmure.

Ce silence le rendit lyrique :

– Ah, vous avez fui, sorcières échevelées, trolls hystériques et



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.