180 degrés - virage d'une vie by Marie-Claude Savard

Auteur:Marie-Claude Savard [Savard, Marie-Claude]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Québécois, Autobiographie
ISBN: 9782764811498
Éditeur: Libre Expression
Publié: 2015-10-19T04:00:00+00:00

DAMIEN BINETTE

On a hâte de te revoir Marie-Claude. On s’ennuie de ton sourire.

«Qu’est-ce que tu fais, ces temps-ci?»

Maudite question.

La question qui tue, pour un pigiste sans emploi. Une terreur d’interrogation qui revient à tout coup, plusieurs fois par jour. C’est une agression en bonne et due forme que de demander ça à quelqu’un qui amorce un virage professionnel. Ça ramène toutes les angoisses d’un seul coup. J’imagine que ça doit être la même chose pour quelqu’un qui prend sa retraite ou qui se cherche dans son travail. Et les relations sociales sont organisées autour de notre statut au travail.

Chaque fois que je sors, que je rencontre de nouvelles personnes ou que je revois des visages connus que j’avais perdus de vue, on veut tout de suite parler de nos occupations.

— Tu fais quoi, toi?

Tout de suite, on se place dans une catégorie.

— Je me cherche un contrat?

— Je capote un peu, ces temps-ci?

— C’est pas toujours évident, le monde de la pige?

— Euh… je n’ai pas le goût d’en parler?

Toutes des réponses qui causeraient assurément un malaise. Alors, j’y vais plutôt vaguement, positivement.

— Je suis en transition. Je prends du temps pour moi. J’ai plein de projets sur la table, faut juste que je fasse les bons choix. Belle période, très effervescente. Toi?

C’est vrai et ce n’est pas vrai. Je n’aime pas le vide, j’ai toujours envie de le combler. Pourtant, il faut des passages à vide pour laisser la place à l’inspiration qui nous mènera dans la bonne direction.

MAIS C’EST CAPOTANT!

Je ne sais pas quand je travaillerai à nouveau en télévision. Le téléphone n’a pas sonné depuis la fin de MCBG. Je fais un remplacement d’été à la radio. Je travaille aux aurores avec Jean-Pier Gravel, un autre ancien de Salut Bonjour! Décidément! Un contrat de dix semaines, de juin à août, qui me permet d’atterrir de MCBG et de faire le pont entre le travail et le néant qui devient de plus en plus inévitable.

Il n’y a pas d’ouverture pour un poste permanent à la station de radio où je remplace. Même si tout va bien cet été, il faudra se dire «à la prochaine», une fois l’automne arrivé. Je développe à long terme.

Il aurait fallu que je présente des projets de télé, que je rencontre des producteurs et des diffuseurs l’automne dernier, pour trouver un poste à temps pour septembre. Mais il y a un an, j’avais deux emplois, alors je n’ai pas pensé à plancher sur autre chose.

Une autre leçon de travailleur autonome! Plan A, plan B, plan C.

La bonne nouvelle, c’est que ce n’est pas catastrophique, pour le moment. J’ai compris le concept de mettre de côté pour les temps plus difficiles, alors mon année de travail intensif me donne quelques mois de liberté. Il y aura sûrement d’autres remplacements, des droits d’auteur sur mon livre. En contrôlant les dépenses, je serai en mesure d’honorer mes obligations pendant quelques mois. Par moments, j’ai totalement confiance qu’il se passera quelque chose. Les moins bons jours, je suis inquiète pour le long terme.

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