100 000 dollars pour l'Everest by Yves Ballu

100 000 dollars pour l'Everest by Yves Ballu

Auteur:Yves Ballu [Ballu Yves]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Montblanc
Publié: 2013-04-14T16:00:00+00:00


4

À tombeau ouvert… Basile n’avait encore jamais réfléchi au sens de cette expression courante. Maintenant, il en mesure toute la pertinence. Mais il ne ralentit pas pour autant. L’avenue Pierre-Brossolette est à deux voies. Il en profite : cent quarante… cent cinquante… Au-dessus de l’autoroute, le survol des faisceaux lumineux filant à toute allure est magique, grisant. Un léger freinage pour négocier le virage à gauche qui marque l’entrée de la route de liaison. Encore une portion droite jusqu’à la N20. Au croisement de l’avenue du Général-Leclerc, deux voitures attendent sagement que le feu passe au vert. Il se déporte sur la gauche pour les doubler. Sur sa lancée, il traverse le carrefour en misant sur la marée basse de la circulation à cette heure tardive de la nuit. Mauvaise pioche ! La camionnette qui s’était engagée sur la droite pile en catastrophe. Dans le faisceau des phares, la tête du chauffeur : furibard. Pas le temps de s’excuser. Encore moins d’expliquer. Au demeurant, l’autre se fout pas mal de savoir qu’un môme de dix-sept ans est en train de se faire tabasser. Peut-être à mort.

En arrivant chez Marcela, il l’a pourtant prévenue :

— J’ai un rancard à minuit. Faudra faire gaffe à l’heure.

Elle n’a pas regardé sa montre. C’est lui qu’elle a observé, stupéfaite :

— Mais, qu’est-ce qui s’est passé ?

— T’inquiète… C’est pas avec une poule.

— J’m’en fous, de ton rancard.

Du bout des doigts, elle a passé en revue les dégâts : pommette violacée, œil au beurre noir :

— T’as vu ta figure ?

— J’t’e raconterai tout à l’heure. Viens.

La prenant par la main, il l’a entraînée vers la chambre. Elle n’était pas en grande forme, la Musaraigne. Un peu absente, évasive, insaisissable… Pas vraiment dans son assiette. Pourtant, c’est bien elle qui avait appelé ce matin : « Je t’attends ce soir. » Laconique, mais suffisamment explicite pour laisser entendre que la hache de guerre était enterrée. Ça n’arrangeait pas vraiment Basile, mais il avait trop envie de la revoir.

Simplement, il s’attendait à la trouver plus… entreprenante. Mais avec les femmes, la météo est tellement incertaine…

— Allez, viens.

— Tu t’es battu ?

— J’te raconterai plus tard.

— Non, maintenant.

Une fois assise au bord du lit, elle est restée inflexible :

— Alors ?

Alors, il a dû raconter sa visite chez les Sinlou, à commencer par sa gêne et son émotion devant la jeune femme :

— Les meufs… elles se rendent pas compte comment elles sont moches quand elles chialent… D’abord, ça fait un vilain bruit quand elles essaient de parler – genre hoquets, miaulements, couinements… – et puis, ça renifle, ça coule de partout : du nez qui se transforme en lumignon, des yeux tout rouges qui rétrécissent, avec le maquillage qui fout le camp sur leur tronche bouffie… Franchement, elles devraient se cacher pour chialer. Et puis, y’en a d’autres, elles sont encore plus belles quand elles ont du vague à l’âme. Et là, c’est carrément la grande classe ! Alice – c’est son nom –, elle était triste, mais… délicate… j’veux dire, pas délabrée.



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