04 A contre-courant du grand toboggan by Winslow Don

Auteur:Winslow,Don [Winslow,Don]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Polcier
ISBN: 9782070495856
Google: AF3yOwAACAAJ
Amazon: 207049585X
Éditeur: Gallimard
Publié: 1999-02-26T23:00:00+00:00

*

Neal finit de charger la Jeep et rentra dans la maison. Il avait – non sans difficulté – mis au point un plan d’action avec Chuck, qui était parti avec Evelyn, Brogan et Brejnev tant il était impatient de faire avancer les choses.

Neal gagna le salon et lança à Karen :

— Si le M.L.F. est prêt à partir…

— Très drôle, répondit-elle. Tu sais que tu es un marrant, toi ?

— Est-s’que j’peux au min prendre mon… ? fit Polly.

— Non, lui répondit Neal pour la quinzième fois. On n’a pas beaucoup de place et on doit voyager léger.

— Ouaieeuuh, mais…

— On pourra acheter des trucs en route ! dit Neal.

On ne manque pas d’espèces, songea-t-il.

Karen prit le volant car elle était une excellente conductrice et ainsi, Neal put se concentrer sur l’extérieur. Les premières minutes seraient les pires. Si quelqu’un allait essayer de tirer sur Polly dans la Jeep, il allait devoir le faire avant la première bifurcation. Neal retint son souffle jusqu’à ce qu’ils soient sur la Route 50, en direction de l’ouest, et aient quitté la ville.

Karen s’engagea dans le chemin de terre qui descendait jusqu’au ranch des Milkowsky. De gros lièvres et de rares coyotes décampaient dans la lumière des phares. Le clair de lune argentait l’armoise. D’habitude, Neal adorait traverser ce paysage de nuit, mais en ces circonstances, il semblait irréel et dangereux.

— Tu nous emmènes oùeeuuh ? fit Polly. Sur la luneeuuh ?

Et elle ajouta, avec une inquiétude non feinte :

— On va pas faire du campingue, j’espèreeuuh ?

— Continue de baisser la tête comme je t’ai dit et tais-toi, lui ordonna Neal.

Polly, semblait-il, avait retrouvé la forme – ce qui n’était pas forcément un bien.

Arrivés à l’embranchement qui menait chez les Milkowsky, Neal demanda à Karen de s’arrêter. L’idée de faire escale au ranch le rendait un peu nerveux étant donné que Withers connaissait l’endroit et qu’il pourrait deviner qu’ils s’y étaient réfugiés.

— En passant devant le ranch le plus vite possible, tu peux atteindre les combien ? demanda-t-il à Karen.

Il était superflu d’avancer furtivement, et, s’il y avait quelqu’un à l’intérieur, il voulait lui laisser le moins de temps possible pour ajuster son tir.

— Oh, je t’en prie, fit Karen.

Elle mit le pied au plancher et la petite Jeep s’élança en avant, rebondit et fonça droit sur le ranch. Karen pila et la voiture fit une queue de poisson avant de s’arrêter dans l’allée gravillonnée.

— On est arrivéeeuuh ? demanda Polly.

— La ferme ! souffla Neal.

— Faut qu’je pisseeuuh. Avec toutes ces bosseeuuh…

Neal la fusilla du regard et tendit l’oreille.

Aucun bruit. Ça ne voulait rien dire, mais il descendit tout de même de voiture et gagna la véranda. Il fit le tour de la maison jusqu’à la porte de la cuisine et entra. L’obscurité et le silence régnaient.

Neal ressentit dans les bras les picotements qui le parcouraient toujours quand il entrait dans une pièce noire et potentiellement dangereuse. Il se demanda s’il allait jamais dominer cette sensation. Selon Joe Graham, le jour où il s’en serait débarrassé, il devrait prendre sa retraite.

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