Yeruldelgger by Manook Ian

Auteur:Manook, Ian [Manook, Ian]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Policier
Éditeur: ALBIN MICHEL
Publié: 2013-11-13T23:00:00+00:00

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… faire rire la bande et se faire pardonner par Oyun.

* * *

Oyun n’avait pas beaucoup dormi. La veille au soir, après avoir déposé Gantulga chez Solongo et bavardé un peu avec elle à voix basse, dans le jardin, pour lui avouer son inquiétude au sujet de Yeruldelgger, elle était repartie avec son vieux Cube vers le sud jusqu’à Peace Avenue. Elle s’était ensuite engagée vers l’est sur la route de Nalayh, puis avait bifurqué vers le nord dès la sortie de la ville en direction de Shiligeen, sur la route du Terelj. Oulan-Bator se prolongeait en fait jusque-là et elle s’arrêta deux kilomètres à peine après la bifurcation, juste en face de l’ancienne base militaire russe du dixième district. Son plus jeune frère habitait là avec sa femme et ses trois enfants, dans un quartier de yourtes cloisonné de palissades en bois décolorées par le gel et le soleil. Oyun avait toujours la tristesse au cœur quand elle découvrait la yourte sur son minuscule lopin de terre, claquemurée entre ses palissades. La tente traditionnelle de feutre et de bois semblait recluse et triste dans son enclos comme un animal dans un mauvais zoo. La yourte est la fille des steppes, se disait-elle, personne ne devrait l’enfermer ainsi. De quelle illusion de grand départ et de joyeux vagabondages se berçaient encore ceux qui s’y terraient, cloués à jamais dans la capitale dans l’unique espoir d’y survivre ?

Selon la tradition, Oyun avait apporté un cadeau utile et sa belle-sœur lui servit un thé salé gras et chaud à souhait. Puis la jeune inspectrice dit qu’elle était venue pour le quad et son frère l’accompagna à l’extérieur. L’engin était caché sous une bâche, et son frère dit que c’était à cause des gosses, pour qu’ils ne jouent pas dessus. Oyun comprit en le regardant qu’il n’osait pas avouer que c’était à cause des voleurs, et qu’il avait honte de ce qu’était devenu l’esprit des steppes dans ce quartier de pauvres. Elle comprenait, et même si la machine était la sienne et que son frère ne faisait que la garder pour elle, elle demanda la permission de l’emprunter quelques jours. Elle proposa en échange de laisser le Cube à son frère pendant son absence. Une demi-heure plus tard, elle partait en chevauchant le quad pendant que sa belle-sœur, malgré son jeune âge et le quartier pourri, aspergeait les quatre horizons de quelques gouttes de lait pour bénir et protéger son voyage.

Oyun ne rentra pas chez elle. Elle retourna jusqu’au centre de la ville puis bifurqua vers le nord en longeant la rivière Selbe. Trois kilomètres après avoir quitté le douzième district nord, elle s’arrêta au Sukhbataar Ambulatoire, un petit hôtel où elle avait réservé une chambre, juste en face du Kindergarten 109, dans un quartier où les isbas à la russe commençaient à remplacer les yourtes traditionnelles.

La chambre était encore à la mode soviétique et Oyun se demanda quelle clientèle improbable permettait à un hôtel comme celui-là de survivre. Il était trop tard

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