WATERLOO by Erckmann-Chatrian

WATERLOO by Erckmann-Chatrian

Auteur:Erckmann-Chatrian [Erckmann-Chatrian]
La langue: fra
Format: epub
Tags: Romans - Historique
Éditeur: Ebooks libres et gratuits
Publié: 2011-01-23T05:00:00+00:00


XVI

Nous avions passé la Meuse le 12 ; le 13 et le 14, nous continuâmes à marcher dans de mauvais chemins bordés de champs de blé, d’orge, d’avoine, de chanvre, qui n’en finissaient plus. – Il faisait une chaleur extraordinaire, la sueur me coulait sous le sac et la giberne jusqu’au bas des reins. Quel malheur d’être pauvre, et de ne pas pouvoir s’acheter un homme qui marche et qui reçoive des coups de fusil pour nous ! – Après avoir supporté la pluie, le vent, la neige et la boue en Allemagne, le tour de la poussière et du soleil était venu.

Je voyais aussi que l’extermination approchait ; on n’entendait plus dans toutes les directions que le son des tambours et des trompettes ; quand le bataillon passait sur une hauteur, des files de casques, de lances, de baïonnettes se découvraient à perte de vue. Zébédé, le fusil sur l’épaule, me criait quelquefois d’un air joyeux :

– Eh bien ! Joseph, nous allons donc encore une fois nous regarder le blanc des yeux avec les Prussiens ?

Et j’étais forcé de lui répondre :

– Oh ! oui, la noce va recommencer !

Comme si j’avais été content de risquer ma vie et de laisser Catherine veuve avant l’âge, pour des choses qui ne me regardaient pas.

Ce jour même, vers sept heures, nous arrivâmes à Roly. Des hussards occupaient déjà ce village, et l’on nous fit bivouaquer dans un chemin creux, le long de la côte.

Nos fusils étaient à peine en faisceaux, que plusieurs officiers supérieurs arrivèrent. Le commandant Gémeau, qui venait de mettre pied à terre, remonta sur son cheval et courut à leur rencontre ; ils causèrent un instant ensemble et descendirent dans notre chemin, où tout le monde regardait en se disant :

« Quelque chose se passe ! »

Un des officiers supérieurs, le général Pécheux, que nous avons connu depuis, ordonna le roulement et nous cria :

– Formez le cercle !

Mais comme le chemin était trop étroit, les soldats montèrent des deux côtés sur le talus ; d’autres restèrent en bas. Tout le bataillon regardait, et le général se mit à dérouler un papier en nous criant :

– Proclamation de l’Empereur !

Quand il eut dit cela, le silence devint si grand, qu’on aurait dit qu’il était seul au milieu des champs. Depuis le dernier conscrit jusqu’au commandant Gémeau, tout le monde écoutait ; et même aujourd’hui, quand j’y pense après cinquante ans, cela me remue le cœur : c’était quelque chose de grand et de terrible.

Voici ce que le général nous lut :

« Soldats ! c’est aujourd’hui l’anniversaire de Marengo et de Friedland, qui décidèrent deux fois du sort de l’Europe. Alors, comme après Austerlitz, comme après Wagram, nous fûmes trop généreux, nous crûmes aux protestations et aux serments des princes que nous laissâmes sur le trône. Aujourd’hui cependant, coalisés entre eux, ils en veulent à l’indépendance et aux droits les plus sacrés de la France. Ils ont commencé la plus injuste des agressions ; marchons à leur rencontre



Télécharger



Déni de responsabilité:
Ce site ne stocke aucun fichier sur son serveur. Nous ne faisons qu'indexer et lier au contenu fourni par d'autres sites. Veuillez contacter les fournisseurs de contenu pour supprimer le contenu des droits d'auteur, le cas échéant, et nous envoyer un courrier électronique. Nous supprimerons immédiatement les liens ou contenus pertinents.