Urdesh : Le Serpent et la Sainte by Matthew Farrer

Auteur:Matthew Farrer
La langue: fra
Format: mobi, epub
Publié: 2021-05-12T10:38:01+00:00

Damoclès

Maison de la dîme, camp de réfugiés de Ghereppan

Ils chantaient, là-bas, dans les ténèbres.

Le son enflait dans la nuit constellée de flammes et balayait les murs de la maison de la dîme comme des vagues s’écrasant contre une falaise. Les festivités frénétiques qui avaient accompagné l’arrivée de la Beati s’étaient estompées. À présent, ses fidèles s’étaient rassemblés autour des feux de camp les plus proches et autour de l’édifice lui-même. De manière semi-consciente, ils s’étaient arrêtés au niveau de l’ancienne enceinte du bâtiment, comme si la poignée de poteaux vermoulus et les quelques chaînes tendues entre eux constituaient encore une barricade. L’islumbine ne poussait pas sur Urdesh ; les réfugiés les plus dévots se contentaient donc de tresser des guirlandes avec des algues marines fraîches qu’ils avaient ramassées le long du rivage avant de les ramener dans le bidonville afin que les enfants, les vieillards et les plus malades tentent de jouir au plus vite de la bénédiction de la Sainte.

Pour le jeune Bairet Henztrom, second lieutenant du vingtième régiment de l’armée régulière urbaine urdeshie, cette nuit était déjà bénie au-delà de toutes ses espérances. Quand il avait compris que ses blessures pourraient l’empêcher de rejoindre son unité, il avait passé le reste de sa convalescence plongé dans un désespoir presque enfiévré, songeant à ses camarades qui se battaient encore dans l’enfer qu’était le centre de Ghereppan. Plus d’une fois, il avait souhaité que l’unité du Pacte du Sang achève la besogne et le réduise en pièces dans le charnier qu’était devenu cet hab-bloc abandonné. Puis il avait pleuré de honte pour avoir eu une pensée aussi égoïste et avait supplié l’Empereur de le laisser comprendre pourquoi Il avait voulu qu’il soit ramené en vie au medicae. Car il devait assurément y avoir une raison à cela ?

Et voilà qu’à présent, il côtoyait des space marines –des space marines ! –devant les portes d’un bâtiment où la Sainte Vivante était en train de prier. Il ne pouvait s’empêcher de repenser à son enfance, ses sœurs et lui arpentant les différentes Stations du Trône dans la chapelle des réfugiés, les yeux levés vers les portraits de plastiverre représentant les guerriers de l’Adeptus Astartes marchant sur les remparts. Ils l’avaient intimidé, à l’époque. Et ils étaient plus petits que ceux-ci.

Le cœur d’Henztrom bondissait dans sa poitrine à chaque fois qu’il regardait ces cinq géants en armure déployés devant le mur de la maison de la dîme, les armes à la main. Aucun d’entre eux n’avait bougé depuis qu’ils s’étaient mis en position ; ils auraient tout aussi bien pu être des statues bordant l’allée menant à un temple. Les lumières lointaines accrochaient des reflets métalliques à leurs armes et à la patine grisée de leurs harnois.

Les chants collectifs qui s’élevaient dans la nuit conféraient à la scène une ultime touche onirique. La chanson se répétait en boucles infinies de gammes mineures ; toutes les septièmes syllabes étaient chantées plus fort, toutes les vingt et une étaient un aboiement bref évoquant presque un cri de guerre.

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