Une neige de juillet by Jean-Luc Fabre

Une neige de juillet by Jean-Luc Fabre

Auteur:Jean-Luc Fabre [Fabre, Jean-Luc]
La langue: fra
Format: epub
Tags: terroir
ISBN: 9782812900556
Éditeur: De Borée
Publié: 2010-05-15T22:00:00+00:00


Après une longue route tortueuse elles traversèrent enfin le village de Saint-Martial, alors que midi venait de sonner au clocher de l’église. Moins d’un quart d’heure plus tard, Françou immobilisait sa voiture en contrebas du mas, alors que Suzanne descendant précipitamment de la terrasse venait les accueillir à bras ouverts.

Tout d’abord, elle embrassa les enfants, soulagée que rien ne leur soit arrivé au cours de ce long périple jusqu’à l’Aigoual. En effet, depuis leur départ, elle avait vécu dans l’angoisse et n’avait passé que des nuits sans sommeil à écouter le vent et la pluie se déchaîner, imaginant le pire à chaque coup de tonnerre. Ensuite elle regarda Juliette arriver vers elle, presque les larmes aux yeux, et l’étreignit à son tour. Puis, la fixant dans les yeux, elle lui dit doucement d’une voix grave :

« Quoi qu’il arrive, avec Jacques, vous pouvez compter sur nous et même s’il n’a pas de travail avant l’hiver, ne vous en faites pas, nous attendrons ensemble le printemps. »

Une larme roulant sur chaque joue, Juliette lui fit signe d’un hochement de tête qu’elle comprenait à quel point ce n’était pas des paroles en l’air et combien elle savait pouvoir compter sur elle. Elles n’en dirent pas plus, cela aurait été inutile et déplacé. La solidarité devait se payer d’actes et non de paroles, c’était ainsi depuis des générations au hameau. Alors, comme s’il ne s’était rien passé, comme si elles ne s’étaient pas quittées depuis plus de cinq minutes, elles recommencèrent à parler de tout et de rien, profitant juste du bonheur d’être ensemble.

Sans manière, Suzanne convia tout le monde à manger sur la terrasse du mas et, pour l’occasion, elles allèrent même chercher la mémé Marie qui compléta le groupe. Après avoir mis le couvert à l’ombre de la glycine, elles passèrent à table sans tarder autour de grandes plaques de légumes de saison lentement cuits au four, alors que Suzanne décrétait fièrement en posant un pichet de vin de table :

« Ce n’est pas parce que les hommes ne sont pas là qu’il faut qu’on vide la source ! »

Riant de concert, les quatre femmes se servirent un verre de vin et appelèrent Cécile et Vincent, qui s’étaient déjà réfugiés dans la maisonnette, pour se livrer à un de ces jeux dont ils avaient le secret. Mangeant tous de bon cœur les légumes cuisinés par Suzanne, largement arrosés d’huile d’olive et accompagnés de larges tranches de pain tartinées de pélardons écrasés, la conversation se fit plus lâche le temps du repas. À la fin de celui-ci, les enfants retournèrent bien vite dans la maisonnette, comme si après trois jours d’exode ils éprouvaient le besoin de retrouver ce petit coin bien à eux. Désormais inséparables, ils venaient de vivre la première grande aventure de leur enfance et partageaient depuis leur montée à l’Aigoual la fierté d’avoir accompli leur première transhumance.

Autour de la table, les femmes en profitèrent pour reprendre leur conversation d’adultes, alors que la mémé Marie venait de s’endormir sur son fauteuil à l’heure exacte de sa sieste quotidienne.



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