Un Noël pour aimer - Urgences sous la neige by Amalie Berlin

Auteur:Amalie Berlin [Berlin, Amalie]
La langue: fra
Format: epub
Éditeur: Harlequin
Publié: 2019-10-01T04:00:00+00:00

2.

Lyons sortit à grandes enjambées du bureau de Masterson. Il était tendu à s’en faire mal au dos – une tension qui ne l’avait pas quitté depuis qu’il avait découvert cette ridicule idée de fêter Noël dans le service.

Malgré la moquette, il percevait un mouvement derrière lui. Soit Sabetta le suivait, soit c’était cette assistante qui s’agitait toujours dans tous les sens. Il ne s’arrêta pas pour vérifier ; si Sabetta ne suivait pas, quelqu’un d’autre l’accompagnerait plus tard en bas.

Il ne pouvait pas se permettre de couver cette femme. Ah, si seulement il avait pu échanger la fortune de sa famille contre du temps… Quand il était de service, il n’en avait jamais assez. Il n’en avait pas pour se rendre aux Ressources humaines, mais il y était allé quand même, excédé, comptant faire vite. Cela avait déjà pris trop longtemps. Qui savait ce qui avait pu se passer aux urgences en son absence ? Il aurait voulu pouvoir veiller au grain en permanence pour prévenir les ennuis éventuels.

Il avait beau avoir la vocation pour la médecine d’urgence, il savait d’expérience – et une rude expérience – que le public qu’ils recevaient était parfois dangereux. Les pédiatres traitaient peut-être des enfants inoffensifs, mais ils étaient exposés aux réactions de parents difficiles, aussi, surtout lorsqu’ils soignaient des cas d’abus physiques. Les urgentistes généralistes pouvaient voir des grands-mères ou des hommes à l’air aimable qui s’étaient blessés en battant un proche à mort. Ou encore des patients menottés, escortés par la police parce qu’ils représentaient un danger pour autrui. Et cela ne suffisait pas toujours à réduire les risques. Les chirurgiens en traumatologie prenaient souvent en charge des gens inconscients, mais ils devaient ensuite affronter ceux qui les avaient accompagnés – qui pouvaient devenir violents en apprenant de mauvaises nouvelles. Ou, pire, un fou armé d’un revolver pouvait se mêler à la foule des entrants et des sortants et se mettre à tirer. C’était déjà arrivé.

Lyons atteignit le couloir sans ralentir l’allure. Sa tâche principale était la vigilance, la médecine venait en second. Il devait faire ce qu’il n’avait pas réussi à accomplir au Noël précédent et être attentif à ce que lui disaient ses tripes.

Il entendit des pas rapides sur le carrelage, derrière lui, et lança par-dessus son épaule :

— Vite.

La différence entre ce Noël-ci et celui de l’année précédente, c’était qu’il comprenait désormais ce que lui soufflait son instinct. Les trois balles qu’il avait reçues du mari d’une collègue l’avaient rendu attentif à tout, dans son propre intérêt et dans celui de ceux qui n’avaient pas eu la malchance d’apprendre la même leçon de la vie.

Même sans le bruit de ses pas pressés, il sentait la présence de la jeune infirmière lui brûler le dos. Pour une fois, la conscience d’avoir quelqu’un derrière lui n’était pas un signal de danger. Il la sentait là, simplement. Mais cela l’ennuyait parce que sa concentration en pâtissait.

Il ne sentait pas souvent grand chose, en vérité, à part cette tension devenue si intime qu’elle l’accompagnait même dans son sommeil.

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