Trop chère Émilie by Hélène de Monaghan

Auteur:Hélène de Monaghan [Monaghan, Hélène de]
La langue: fra
Format: epub
ISBN: 2702405312
Éditeur: Librairie des Champs-Élysées

Sœur Maryvonne du Cœur-Immaculé-de-Marie

Hospice Saint-Vincent

56003 VANNES

Paris le 2 août

Ma chère Vovonne

J’ai reçu ta lettre ce matin, et elle m’a fait beaucoup de bien. Merci de prier pour ma pauvre Madame et de m’inviter à passer une semaine à l’hospice avec toi. Ça me fera une bonne distraction. Sophie m’a donné la permission et j’ai déjà été à la gare retenir ma place. J’arriverai à Vannes le 7 au train de 20 h 52 et je repartirai le 17 août.

Il faut te dire que je suis maintenant chez elle, mais peut-être pas pour longtemps.

Tout de suite après la mort de Madame, Sophie m’a proposé de travailler pour elle et M. Donald et aussi un peu pour le docteur de l’immeuble qui était un de leurs bons amis. Il devait me loger dans sa chambre de service.

Malheureusement, figure-toi que ce docteur Delarue, un homme très gentil et très bon, s’est tué en voiture hier matin, en allant en Bretagne faire du bateau. Il a dû s’endormir au volant. Il est allé buter dans un arbre, sa voiture a grillé et lui avec, le pauvre garçon. C’est les gendarmes qui sont venus nous annoncer la nouvelle pour qu’on prévienne sa famille. M. Donald était occupé à ce moment-là. Je les ai reçus avec Sophie. Ça nous a fait un coup à toutes les deux. Surtout à Sophie. Après le départ des gendarmes elle a eu une vraie crise de nerfs. Deux morts si près d’elle et si vite, c’était trop. Elle ne se connaissait plus, elle disait des gros mots et même des vilaines choses contre la Providence. Elle avait trop de chagrin et trop de colère.

Après elle m’a dit : « — Émilie, maintenant que le docteur Delarue est mort, il va falloir que tu te cherches une autre place. » — « Je ne vois pas le rapport », j’ai dit. — « Espèce d’idiote, elle m’a répondu, tu ne comprends pas que c’est lui qui devait me permettre de te garder avec nous. »

Et elle m’a expliqué que le docteur Delarue était comme un grand frère pour elle et qu’il lui prêtait de l’argent quand elle en manquait. J’ai pensé, vu ce que gagne M. Donald, autant dire rien, c’est souvent qu’il a du boucher les trous. Il ne voulait même pas qu’elle le dise à son mari pour ne pas le vexer. Tu vois que c’était une crème d’homme, et très convenable avec ça, très comme il faut.

J’ai dit à Sophie de ne pas s’en faire pour moi.

M. Jérôme m’a proposé le jour de l’enterrement de Madame, de travailler chez lui. Ça me ferait bien plaisir d’accepter. Sophie m’a demandé d’attendre encore avant de le prévenir, des fois qu’il y aurait un miracle et qu’elle puisse me garder. De toute façon, on m’a déjà payé mon mois d’août.

J’ai proposé de faire une neuvaine pour le miracle. Surtout aux environs du 15 août, c’est une bonne période pour demander quelque chose à la Vierge. Si tu veux nous la ferons ensemble.

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