Spinoza - L'homme qui a tué Dieu by unknow

Spinoza - L'homme qui a tué Dieu by unknow

Auteur:unknow
La langue: fra
Format: epub
Tags: Roman historique
Éditeur: HC Éditions
Publié: 2023-09-21T13:19:24+00:00


XXI

Il faisait froid dans la chambre et la table avait été placée à côté du feu de tourbe, pour y bénéficier d’un peu plus de chaleur. Placé derrière son élève, Bento jeta un coup d’œil par-dessus son épaule, pour lire ce qu’il était en train d’écrire sur la feuille de papier. Les mots qu’il vit sortir de la plume du garçon lui firent claquer la langue d’impatience.

— Non, Johannes, ce n’est pas du tout ça ! le corrigea-t-il. Ce que Descartes a dit, ce n’est pas que nous ne pouvons rien savoir d’autre que le fait que nous existons. Au contraire, il pensait qu’il était parfaitement possible de connaître la réalité… à condition d’adopter la bonne méthode, bien sûr. Cette méthode, c’est la raison.

— Mais vous m’avez dit, tout à l’heure, que Descartes a méthodiquement tout mis en doute…

— Le doute méthodique est une méthode pour parvenir à la vérité, pas un refus qu’il y ait une vérité, expliqua Bento. Dieu ne nous ment pas, comme l’a bien montré Descartes. Ce qu’il voulait dire par là, c’est que nous pouvons faire confiance à ce que nous voyons autour de nous, même si nous devons nous méfier des conclusions et des déductions erronées, nées de raisonnements incorrects. Cependant, si nous utilisons la bonne méthodologie, nous parviendrons à la vérité.

L’élève raya la partie en question et la réécrivit selon les indications qu’il venait de recevoir de son professeur. Celui-ci retourna s’asseoir et, sous la fenêtre à l’épais verre plombé qui laissait entrer la lumière de l’après-midi, se remit à lire la lettre qu’Oldenburg lui avait envoyée de Londres. Son Invisible College était apparemment en pleine expansion et, ayant reçu l’approbation du roi Charles II, avait changé de nom pour devenir la Royal Society.

Les cours particuliers que Bento donnait aux étudiants de l’université de Leyde étaient devenus une source régulière de revenus pour lui, même si l’ignorance de certains l’exaspérait. Nombreux étaient ceux qui prenaient le trekschuit pour se rendre à Rijnsburg le matin, suivaient ses cours la journée, et rentraient à Leyde le soir. Ils venaient surtout pour apprendre Descartes, car Bento avait acquis une réputation de penseur versé dans les thèmes cartésiens, tout en étant déjà secrètement fatigué de voir l’obsession des libéraux pour le philosophe français. Descartes était un génie, sans aucun doute, mais comment était-il possible que les soi-disant cartésiens n’aient pas découvert les erreurs qui lui semblaient si évidentes ? Bien qu’évidentes, il n’osait pas les exposer à son élève. Johannes Casearius était allé plus loin que les autres étudiants qui lui demandaient des explications.

Au lieu de faire la navette entre Rijnsburg et Leyde tous les jours, il s’était serré la ceinture et avait loué une chambre dans la maison où séjournait Bento, pour éviter de perdre un temps précieux en déplacements. Ce n’était peut-être pas le plus astucieux de ses élèves, mais il ne faisait aucun doute qu’il était intelligent. Casearius était étudiant en théologie, les cours portaient donc sur Principia Philosophiae de Descartes, puisque cet ouvrage commençait par traiter des preuves de l’existence de Dieu.



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