Sequels T1- L'amant de l'ombre by McNaught Judith

Auteur:McNaught, Judith [McNaught, Judith]
La langue: fra
Format: epub
Tags: A&P
Éditeur: J'ai lu
Publié: 0101-01-01T00:00:00+00:00

Victoria se tournait et se retournait dans son lit sans trouver le sommeil. Épuisée, elle ressassait sans cesse les mêmes pensées. À l'aube, elle renonça à s'endormir et s'assit dans son lit, contemplant au-dehors le ciel qui virait lentement du noir au gris pâle. Elle se sentait aussi triste et morose que la journée qui s'annonçait. Adossée contre ses oreillers, elle épluchait distraitement le couvre-lit de satin tandis que sa vie future se déroulait devant elle, semblable à un long tunnel noir et effrayant. Elle pensa à Andrew qui en avait épousé une autre et qu'elle avait perdu à jamais; elle songea aux gens de son petit village qu'elle aimait et qui l'aimaient en retour. Maintenant, il n'y avait plus personne pour l'aimer. Sauf oncle Charles, bien sûr, mais son affection ne réussissait pas à combler l'immense vide qu'elle ressentait. Elle avait toujours été active et adorait rendre service. Or sa vie n'était plus qu'une succession effrénée de frivolités mondaines... et Jason payait la note. Elle se sentait si... si inutile, si vaine, si encombrante.

Elle avait voulu suivre le conseil cynique de Jason et tenter de se trouver un mari. Mais c'était plus fort qu'elle, elle ne pouvait se résoudre à épouser l'un de ces bellâtres qui se disputaient ses faveurs. Ce n'était pas une épouse qu'ils cherchaient, mais plutôt un ornement ou une décoration. À part quelques rares exceptions, les mariages ici ne se faisaient que pour des raisons de convenance et d'intérêts. Rien de plus. Quant aux enfants, on les confiait dès leur plus jeune âge à des nourrices et à des précepteurs. Comme le mariage avait une signification différente dans ce pays!

Elle se rappela avec mélancolie les ménages unis qu'elle avait connus à Portage. C'étaient des gens qui travaillaient ensemble, qui s'aidaient mutuellement à passer les épreuves de la vie; des gens qui riaient ensemble, qui élevaient leur enfants ensemble, qui pleuraient parfois ensemble aussi.

Victoria pensa à ses propres parents. Même si Katherine n'aimait pas son mari d'amour, elle avait créé un foyer chaleureux avec lui et elle avait été sa compagne jusqu'au bout. L'hiver, ils aimaient jouer aux échecs devant la cheminée et, l'été, ils partaient se promener longuement au crépuscule.

À Londres, Victoria était adulée pour la simple et unique raison qu'elle était « à la mode ». Une fois mariée, elle n'aurait d'autre rôle que celui de décorer la table de son mari lorsqu'il recevrait des invités. Elle demandait autre chose à la vie. Elle voulait la partager avec quelqu'un qui aurait besoin d'elle, le rendre heureux et avoir de l'importance à ses yeux. Elle ne voulait pas être un objet décoratif.

L'affection que lui portait le marquis de Salle était sincère, elle le sentait, mais il ne l'aimait pas, malgré ses déclarations enflammées.

Elle se mordit les lèvres pour ne pas crier en se souvenant des tendres promesses d'Andrew. Et pourtant il l'avait trahie. Le marquis de Salle ne l'aimait pas non plus. C'était peut-être la richesse qui empêchait ces personnes-là, Andrew compris, d'éprouver un amour authentique.

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