René by François-René de Chateaubriand

René by François-René de Chateaubriand

Auteur:François-René de Chateaubriand [Chateaubriand, François-René de]
La langue: fra
Format: epub, mobi
Tags: Roman, Littérature française, 19e
Éditeur: Bibliothèque numérique romande
Publié: 2018-08-02T00:00:00+00:00


À RENÉ.

« Le ciel m’est témoin, mon frère, que je donnerais mille fois ma vie pour vous épargner un moment de peine ; mais, infortunée que je suis, je ne puis rien pour votre bonheur. Vous me pardonnerez donc de m’être dérobée de chez vous comme une coupable ; je n’aurais jamais pu résister à vos prières, et cependant il fallait partir… Mon Dieu, ayez pitié de moi !

» Vous savez, René, que j’ai toujours eu du penchant pour la vie religieuse ; il est temps que je mette à profit les avertissements du ciel. Pourquoi ai-je attendu si tard ! Dieu me punit. J’étais restée pour vous dans le monde… Pardonnez, je suis toute troublée par le chagrin que j’ai de vous quitter.

» C’est à présent, mon cher frère, que je sens bien la nécessité de ces asiles, contre lesquels je vous ai vu souvent vous élever. Il est des malheurs qui nous séparent pour toujours des hommes ; que deviendraient alors de pauvres infortunées !… Je suis persuadée que vous-même, mon frère, vous trouveriez le repos dans ces retraites de la religion : la terre n’offre rien qui soit digne de vous.

» Je ne vous rappellerai point votre serment : je connais la fidélité de votre parole. Vous l’avez juré, vous vivrez pour moi. Y a-t-il rien de plus misérable que de songer sans cesse à quitter la vie ? Pour un homme de votre caractère, il est si aisé de mourir !

» Croyez-en votre sœur, il est plus difficile de vivre.

» Mais, mon frère, sortez au plus vite de la solitude, qui ne vous est pas bonne ; cherchez quelque occupation. Je sais que vous riez amèrement de cette nécessité où l’on est en France de prendre un état. Ne méprisez pas tant l’expérience et la sagesse de nos pères. Il vaut mieux, mon cher René, ressembler un peu plus au commun des hommes et avoir un peu moins de malheur.

» Peut-être trouveriez-vous dans le mariage un soulagement à vos ennuis. Une femme, des enfants, occuperaient vos jours. Et quelle est la femme qui ne chercherait pas à vous rendre heureux ! L’ardeur de votre âme, la beauté de votre génie, votre air noble et passionné, ce regard fier et tendre, tout vous assurerait de son amour et de sa fidélité. Ah ! avec quelles délices ne te presserait-elle pas dans ses bras et sur son cœur ! Comme tous ses regards, toutes ses pensées, seraient attachés sur toi pour prévenir tes moindres peines ! Elle serait tout amour, tout innocence devant toi ; tu croirais retrouver une sœur.

» Je pars pour le couvent de… Ce monastère, bâti au bord de la mer, convient à la situation de mon âme. La nuit, du fond de ma cellule, j’entendrai le murmure des flots qui baignent les murs du couvent ; je songerai à ces promenades que je faisais avec vous au milieu des bois, alors que nous croyions retrouver le bruit des mers dans la cime agitée des pins.



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